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l’unique force du parti lorrain, qui avait cessé d’être le parti catholique ; mais jusque dans cette grande ville des symptômes de lassitude et de mécontentement commençaient à se révéler. Désirant la paix et n’ayant plus à faire à sa conscience le sacrifice de ses intérêts, la bourgeoisie se séparait du menu peuple, demeuré ardemment dévoué au duc et à la duchesse de Mercœur. En 1596, M. Dubat de Launay, maire de Nantes, devenait le chef du parti pacifique, et aux élections municipales de l’année suivante le duc ne parvenait qu’à force d’efforts à faire choisir le nouveau maire parmi ses affidés.

C’étaient là des signes du temps, et personne ne pouvait plus les méconnaître. Ce fut alors que le duc de Mercœur, bien plus au fait qu’on ne l’était à Paris de ses périls véritables, conçut la pensée de se ménager un accommodement en proposant le mariage de César Monsieur avec sa fille, qui était le plus grand parti du royaume. Faible comme père et comme amant, Henri s’empressa d’admettre un projet qu’avait très chaleureusement accueilli la duchesse de Beaufort, parce qu’il assurait à son fils, âgé de quatre ans, la main de l’héritière des maisons de Lorraine, de Luxembourg et de Penthièvre. Aussi souple au déclin de sa fortune qu’elle s’était montrée d’abord résolue, Mme de Mercœur s’empressa de faire remonter jusqu’à Gabrielle d’Estrées tout l’honneur d’une victoire qu’il aurait été facile de payer d’un moindre prix. Philippe-Emmanuel de Lorraine obtint une capitulation plus favorable que s’il avait été encore à redouter, et Sully en fut pour ses observations, assuré d’avance, nous dit-il, de perdre son procès auprès du roi devant la femme qui lui en avait déjà fait perdre tant d’autres. Le 20 mars 1598 fut signé le traité que Mercœur passa avec son roi comme de puissance à puissance. La résistance obstinée du gouverneur de Bretagne est expliquée dans le préambule de cet acte par sa piété et son patriotisme, et les effets de toutes les mesures prises par son gouvernement sont consacrés et ratifiés. Vingt-trois articles secrets, ayant même force et valeur que l’instrument public, contiennent les engagemens pris par Mercœur pour le mariage de sa fille avec le fils naturel du roi et renonciation des sommes énormes qu’au désespoir du surintendant Henri IV s’engage à payer à Philippe-Emmanuel de Lorraine en échange du gouvernement de la Bretagne, auquel celui-ci veut bien renoncer au profit de son futur gendre. Parmi les stipulations particulières annexées à cette convention, aucune n’est plus étrange que celle qui concerne Fontenelle, placé, pour le mode de traitement qui lui est fait et les avantages qui lui sont promis, sur la même ligne que le duc de Mercœur lui-même. Il est entendu en effet que les conditions générales du traité lui seront rendues communes, s’il consent à y adhérer sous quinze