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vite, et le temps n’était plus où l’on pouvait faire appel à l’équité du peuple romain. Hérode Antipas, dont Jésus, comme Galiléen, fut le sujet, ne montra aucune espèce de talent, et ne fut guère qu’un jouet entre les mains de son ambitieuse épouse, Hérodiade, femme en premier lieu d’un autre Hérode qui n’avait eu aucune part au royaume de son père et se contentait de mener à Rome une vie fastueuse. Hérodiade se mourait de dépit de n’être pas reine, et quand Antipas vint à Rome, elle abandonna son mari et s’enfuit en Galilée pour trôner à côté du faible principicule. On dirait qu’elle avait deviné ou repris les projets ambitieux du fondateur de la dynastie, mais en les dissimulant trop peu. Ce qui est certain, c’est qu’elle et son second mari, l’an 39 de notre ère, furent internés à Lyon, comme Archélaüs l’avait été à Vienne, sous prétexte qu’ils tramaient quelque chose avec les Parthes contre la sûreté de l’empire.

Sous Hérode Agrippa Ier, le seul capable parmi les descendans du premier Hérode et qui régna de l’an 41 à l’an 49, les choses prirent en Judée une tournure relativement bonne, en ce sens que la Palestine, grâce à la bienveillance de l’empereur Claude, fut réunie de nouveau sous son sceptre, et qu’on vit le nouveau roi s’appliquer à ses devoirs avec plus de zèle que les dissipations de sa jeunesse n’autorisaient à en attendre de lui. Petit-fils de Marianne, il avait du sang asmonéen dans les veines. Sa renommée, qui a souffert chez les historiens chrétiens de la persécution qu’il dirigea contre la communauté chrétienne, est restée en très bonne odeur dans la tradition juive. Lui du moins comprit que, pour se concilier le peuple juif, il fallait être plus ou moins pharisien, et il le fut. En même temps, chez lui plus que chez tout autre Hérode, se révèle la pensée secrète de la dynastie. A la fin de son règne, il avait noué des négociations mystérieuses avec les petits souverains de l’Asie occidentale. Il leur avait donné pour épouses des princesses de sa famille à la condition qu’ils embrasseraient le judaïsme. Il faut noter ici que jamais le prosélytisme juif n’avait fait tant de conquêtes. Les femmes, dans plusieurs grandes villes de l’Asie, des familles princières, entre autres celle de l’Adiabène, l’avaient adopté avec une véritable ferveur. C’est alors aussi que le célèbre rabbin Gamaliel Ier, président du sanhédrin, s’avisa d’adresser de véritables encycliques a toutes les communautés juives de la terre. C’était un commencement de centralisation qui devait singulièrement plaire au roi. Les idées messianiques aidant, de vagues perspectives d’un grand empire théocratique dont Jérusalem serait le centre circulaient en tous lieux. Agrippa consacra de grandes sommes à fortifier Jérusalem et le temple, qui devinrent formidables. Il y eut même une assemblée de princes orientaux convoquée et présidée par lui à