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Asmonéens, donnèrent le ton à la piété des contemporains. Tous furent pharisiens. Il est à noter que ces divines du judaïsme procèdent régulièrement par couples. On voit, par exemple, deux José contemporains des premiers Macchabées, dont l’un, José ben-Jochanan, avait pour maxime favorite : « que ta maison soit toujours largement ouverte, regarde les pauvres comme tes hôtes et ne parle pas beaucoup avec les femmes ; » dont l’autre, José ben-Joezer, insistait d’habitude en ces termes sur le profond respect dû aux rabbis : « que ta maison soit un lieu de réunion pour les sages qui s’occupent de la loi, assieds-toi à leurs pieds dans la poussière, bois avidement leurs paroles. » Ces deux docteurs furent des plus ardens contre les hellénistes et poussèrent les chassidim à renforcer les prescriptions locales qui élevaient un mur de séparation entre l’Israélite et le gentil. Il faut mentionner ensuite l’influent duumvirat de Simon ben-Schetach, ce fanatique de légalisme dont nous avons déjà parlé, et de Juda ben-Tabaï. Le premier fut persécuté sous le roi Jannaï ; mais il rentra en faveur grâce à la protection de la reine Alexandra et réussit à expulser les sadducéens du sanhédrin : le calendrier juif inscrit parmi les jours de fête annuels celui où les pharisiens rentrèrent en maîtres dans la haute assemblée. Le second, réfugié à Alexandrie lors de la même persécution, fut rappelé par le premier, devenu tout-puissant. La lettre de rappel était ainsi conçue : « De moi, Jérusalem la sainte, à toi, Alexandrie ! Mon époux habite chez toi, et je suis abandonnée. » Juda revint et fut reçu par le peuple avec enthousiasme. Schemaja ou Saméas, Abtalion ou Pollion, forment une autre paire de rabbins prépondérant du temps du dernier Hyrkan.

Après ces deux « grandeurs du temps, » comme on les appelait, parurent sous le premier Hérode les deux écoles rivales, également pharisiennes, d’Hillel et de Schammaï. Hillel « le Grand » ou « l’Ancien » vint de Babylone à Jérusalem et fut le premier célèbre de ces rabbins des bords de l’Euphrate qui se vantaient d’en rapporter des traditions plus antiques et plus sûres que celles dont pouvaient disposer les docteurs de Judée. Il tâcha d’introduire un peu de douceur dans le rigorisme pharisien. Le principe d’humanité est puissant chez lui. C’est Hillel qui a résumé toute la loi dans ce seul précepte : « ne fais pas à autrui ce qui t’est désagréable à toi-même. » Il y a dans sa piété quelque chose d’onctueux, de débonnaire, qui contraste avec la sécheresse ordinaire du rabbinisme et qui fait de lui (que ses compatriotes ne lui refusent pas cet honneur !) un de ces précurseurs de l’Évangile qui préparèrent à leur insu les voies à la prédication, d’ailleurs bien autrement hardie et tranchant dans le vif, au fondateur du