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l’arbitraire. Ainsi l’inscription de Bakenkhonsou, si habilement expliquée par Th. Déveria, nous apprend que dans le culte des morts on devait offrir des fleurs à l’image du défunt et des libations à son corps.

A la classe des monumens religieux il faut ajouter les tombeaux, sanctuaires d’un autre ordre, plus multipliés encore que les temples, et qui étaient d’ailleurs souvent accompagnés de chapelles où les parens venaient à certains jours présenter des offrandes au défunt. Ces tombeaux sont parfois des hypogées creusés dans la déclivité des collines et consistant en une ou plusieurs chambres destinées aux momies ; la façade est souvent une œuvre d’architecture ; tantôt ce sont des pyramides élevées dans la plaine et où un caveau a été ménagé pour le mort ; tantôt la chapelle, qui est toute remplie de bas-reliefs, de stèles, d’inscriptions, de tables d’offrandes, de statues, recouvre un puits dont l’entrée a été toujours soigneusement dissimulée. Ce puits vertical aboutit à des chambres souterraines. Après les funérailles, dont le rituel nous fait connaître le cérémonial, le puits était comblé avec du sable, de la terre et des pierres. Il existe enfin des tombes beaucoup plus modestes : elles se réduisent à un simple trou de quelques mètres de profondeur ; l’on y descendait le cercueil, et on ne laissait au-dessus de cette excavation, après l’avoir hermétiquement bouchée, aucun monument commémoratif. Ces divers modes de sépulture prévalurent suivant les temps et les lieux. La même variété s’observe pour les cercueils, auxquels on donnait presque toujours la forme d’une momie, ou sur lequel était représentée l’image du défunt. Tantôt ce sont des sarcophages de granité, comme on les rencontre surtout à Memphis, tantôt des caisses de bois peintes intérieurement et extérieurement, ainsi que cela se voit à Thèbes.

Les particuliers en agissaient donc ordinairement comme les rois. Leur grande préoccupation était d’avoir une belle sépulture, ou tout au moins une sépulture qui fût à l’abri des déplacemens, des profanations. Aussi choisissait-on des emplacemens n’ayant rien à craindre des débordemens du Nil. Tandis que leurs maisons étaient petites, étroites, bâties en bois ou en briques, que le mobilier paraît en avoir été fort simple, les Égyptiens déployaient dans les tombeaux un luxe remarquable ; c’étaient à leurs yeux de véritables demeures, des demeures pour l’éternité ! On y accumulait les objets les plus précieux, on y déposait un grand nombre de ceux qui avaient appartenu au défunt. Un spécimen de ce luxe funéraire nous est fourni par la collection de joyaux découverte il y a quelques années à Drah-Abou’I-Neggah (partie de Thèbes) dans le tombeau de la reine Aah-Hotep, femme de Kamès, dernier roi de la XVIIe dynastie, et mère d’Amosis, premier roi de la XVIIIe.

Ces joyaux, qu’on peut voir à l’exposition universelle,