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par les Grecs avec leur Typhon, et sous les coups duquel on disait qu’Osiris avait succombé. Ressuscité par les prières et les invocations d’Isis, son épouse, qui reproduit les traits de Maut, de Neith et d’Hathor, il avait trouvé un vengeur dans son fils Horus. La passion d’Osiris, la douleur d’Isis, la défaite finale de Set, tout cela fournit à la légende un thème inépuisable de créations qui rappellent ce que l’on retrouve en diverses religions de l’Orient, et notamment l’histoire de Cybèle et d’Atys, de Venus et d’Adonis.

Une fois la course du soleil regardée comme le type de l’existence dans le monde infernal, la doctrine de l’autre vie chez les Égyptiens n’eut pour se constituer qu’à reproduire le même symbolisme. L’homme ne descend dans la tombe que pour ressusciter ; après sa résurrection, il reprendra une vie nouvelle à côté ou dans le sein de l’astre lumineux. L’âme est immortelle comme Ra, et elle accomplit le même pèlerinage. Aussi voit-on sur certains couvercles de sarcophages l’âme figurée par un épervier à tête humaine tenant dans ses serres les deux anneaux de l’éternité, et au-dessus, comme emblème de la vie nouvelle réservée au défunt, le soleil levant, assisté dans son cours par les déesses Isis et Nephthys. Cela explique pourquoi la période solaire symbolisée par l’oiseau Vennou (le vanneau), que les Grecs appelèrent le phénix, fut l’image du cycle de la vie humaine ; l’oiseau mystérieux était censé accompagner l’homme durant sa course dans le monde inférieur. Le mort ressuscitait après ce pèlerinage infernal ; l’âme devait rentrer dans le corps afin de lui rendre le mouvement et la vie, ou, pour parler le langage de la mythologie égyptienne, le défunt arrivait finalement à la barque du soleil, il y était reçu par Ra, le dieu scarabée, et devait briller de l’éclat qu’il lui empruntait. Les tombeaux, les cercueils, abondent en peintures qui retracent les diverses scènes de cette existence invisible. Une des vignettes du rituel funéraire représente la momie couchée sur un lit funèbre, et l’âme ou épervier à tête humaine volant vers elle et lui apportant la croix ansée, symbole de la vie ; la même idée apparaît sous des formes analogues sur plusieurs cénotaphes.

Cette doctrine, qui avait peut-être été importée d’Asie en Égypte, remonte à la plus haute antiquité ; elle conduisait nécessairement à inspirer un grand respect pour les restes des morts, puisqu’ils devaient un jour être rappelés à la vie, et elle a été l’origine de l’usage d’embaumer les cadavres. Les Égyptiens tenaient à conserver intact et à protéger contre toute destruction ce corps destiné à jouir d’une existence plus parfaite. Ils s’imaginaient d’ailleurs qu’ainsi entourées d’enveloppes les momies n’étaient pas privées de toute espèce de vie, et le rituel nous montre que le défunt était supposé se servir encore de ses organes et de ses membres ; mais afin de mieux