Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 71.djvu/1048

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

pondra à la rencontre de Salzbourg ; mais nous espérons qu’elle ne donnera point prétexte aux mêmes commentaires que celle-ci. Quelle matière à réflexions que ces impériales visites ! Les souverains de notre temps montrent dans leurs rapports personnels une mansuétude étrange. Ils se pardonnent tout. Après les luttes politiques, les guerres même qui ont dû les ronger de soucis, les accabler de douleurs, qui ont ébranlé leur puissance, ils échangent entre eux les plus sincères témoignages de l’amitié la plus sensible. Les peuples n’ayant aucune raison de haine mutuelle et les souverains étant si miséricordieux les uns pour les autres, on se demande comment il se fait que les guerres soient encore possibles. Entre le moment où, dans les premières années de son règne, dans les beaux temps du prince de Schwarzenberg, le portrait du jeune François-Joseph ornait un salon de l’Elysée et la visite actuelle, combien d’événemens formidables pour l’empereur d’Autriche se sont accomplis et quelle influence n’ont-ils pas eue sur sa destinée ! Nous ne doutons point que la sensibilité de la France ne soit émue à la vue de ce prince infortuné et patient qui va passer au milieu de nous. La carrière de l’empereur d’Autriche a été mêlée à des événemens si confus, si divers, si dramatiques, qu’on n’oserait porter sur lui un jugement définitif. Ce qu’on peut affirmer et ce qui lui attire l’estime des hommes politiques, c’est qu’il est sincère, appliqué, consciencieux. Depuis qu’il a inauguré le régime constitutionnel, il en observe les principes avec l’exactitude la plus scrupuleuse. Dans la bonne foi qu’il met à remplir ses obligations envers les deux groupes constitutionnels qui composent maintenant sa monarchie, il y a une docilité aux leçons de l’expérience qui fait présager pour lui et ses sujets de meilleurs jours. Son séjour en France, nous en avons la conviction, ne sera l’occasion d’aucun soupçon politique au dehors. Les machinations politiques ne pourraient que lui être funestes. L’Autriche doit être pacifique ; elle ne peut se rétablir que par le repos et les prospérités de l’agriculture, de l’industrie, du commerce, pour lesquelles son sol et ses populations sont si bien faits. Comment pourrait-on avoir la pensée d’entraîner à de nouvelles aventures cet empire, qui a été si profondément et si récemment ébranlé, dont les nouveaux instrumens de gouvernement sont encore si fragiles, qui ne pourrait tenter de nouveaux hasards sans s’exposer à une fin violente et sans laisser en Europe un vide qui ne serait comblé qu’après des luttes infinies ? La sympathie de la France peut être très utile à l’Autriche dans cet effort de l’établissement qu’elle tente ; mais c’est justement pour la conservation de la paix nécessaire à l’Autriche que l’amitié de la France importe aux intérêts de ce pays et de son souverain.

Tandis qu’en Occident, au milieu de peuples catholiques, on laisse tomber en ruine les apanages temporels de l’autorité religieuse, il est