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volumes qui ont successivement vu le jour en 1839, en 1844 et en 1855. Là se montre dans toute sa grandeur l’énergie résolue et tenace du chercheur qui n’abandonne pas un sujet qu’il ne l’ait approfondi et retourné dans tous les sens. Il ne fait rien à moitié : lorsqu’il interroge les faits, il faut qu’ils répondent par un oui ou par un non. Rien d’admirable comme la science stratégique qu’il développe lorsqu’il s’agit d’attaquer un problème par la voie des expériences. C’est la méthode inductive appliquée avec une supériorité qui étonne. On sent d’ailleurs, et il a soin de le dire, qu’il est presque toujours guidé par des idées préconçues sur l’enchaînement mutuel des forces de la nature ; cela explique la hardiesse apparente de ses tentatives : placé plus haut que la foule, son regard porte plus loin, et il aperçoit le possible là où d’autres ne voient que l’absurde. C’est ainsi qu’il espéra magnétiser la lumière, et qu’il y réussit.

La vie de Faraday a été calme ; aucun événement brusque ou violent n’est venu troubler la sérénité de son esprit. Beatus ille… Loin de toute agitation, il passait son temps enfermé dans son laboratoire lorsqu’il avait satisfait à ses devoirs de professeur. En 1829, il avait été nommé lecturer à l’académie militaire de Woolwich, fonctions qu’il remplit jusqu’en 1842. En 1833, John Fuller, le plus bouillant des membres du parlement, fonda une chaire de chimie à l’Institution royale et choisit Faraday pour l’inaugurer. Il stipula expressément que le nouveau professeur ne serait astreint à aucun des devoirs de cette charge et notamment qu’il serait exempt de l’obligation de faire un cours public. Nous avons vu que Faraday ne profita point de cette exception faite en sa faveur, qu’il sut au contraire continuer les glorieuses traditions de Davy. Une pension de 300 livres sterling (7,500 francs), que le gouvernement lui accorda en 1835 sur la proposition de lord Melbourne, vint ensuite améliorer sa position de fortune qui ne fut cependant jamais très brillante. Faraday ne cherchait pas les places lucratives, comme il ne cherchait pas non plus les honneurs.

En 1832, lorsqu’il venait de publier ses premières recherches sur l’électricité d’induction, l’université d’Oxford lui conféra le titre de docteur ès-lois, distinction qui compte en Angleterre parmi les plus honorifiques. Il était correspondant de l’Institut de France depuis 1823 et membre de la Société royale de Londres depuis 1824 ; en 1844, l’Académie des Sciences le nomma un de ses huit associés étrangers en remplacement de Dalton, qui venait de mourir. Par une coïncidence qui a été remarquée, les trois savans qui l’ont suivi sur la liste des associés de l’Académie sont également Anglais ; ce sont sir David Brewster, élu en 1849, sir John Herschel, élu en 1855, et M. Richard Owen, qui succéda à Robert Brown en 1859. Après l’exposition universelle de 1855, Faraday vint à Paris pour la deuxième fois. Il visita les établissements