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grande dans la marine commerciale des différens pays, et un nouveau progrès se prépare avec l’emploi de l’acier. D’après les documens statistiques, on comptait en Angleterre, à la fin de 1864, sur un effectif total de 2,401 navires à vapeur, 848 bâtimens en bois, 1,542 bâtimens en fer et 11 en acier. Si l’on établit la comparaison d’après les tonnages, on trouve, en 1864, pour les bâtimens en bois, un total de 146,000 tonnes, et pour les bâtimens en métal 846,000 tonnes. Depuis 1864, la différence au profit de ces derniers va toujours en croissant ; les coques en bois ne sont plus conservées que pour les bâtimens de faible tonnage. Quant aux grands paquebots employés tant en France qu’en Angleterre pour les communications postales, les types récemment construits sont en fer. La victoire du métal sur le bois peut être aujourd’hui considérée comme définitive.

De même que le fer a remplacé le bois, de même l’hélice tend à se substituer, comme organe moteur, au système des roues. Ce sont les expériences faites par la marine militaire qui ont encouragé, pour les transports du commerce, l’adoption du nouveau mode de propulsion. Ces expériences prouvèrent que l’on obtiendrait par l’hélice une vitesse à peu près égale avec des machines moins puissantes et avec une moindre consommation de combustible. Les compagnies étaient trop intéressées à ce résultat, qui se traduisait par une réduction de dépenses, pour ne pas poursuivre les études si heureusement commencées sur l’emploi de l’hélice. Celle-ci fut d’abord appliquée aux navires qui ont à faire de longues traversées, pour lesquelles l’économie de la houille est d’une importance capitale, et aux services qui n’exigent point en première ligne la condition de vitesse, tels que les transports des émigrans et des marchandises. Le succès fut complet, et aujourd’hui, même sur les lignes postales de l’Europe aux États-Unis, où les compagnies concurrentes luttent de vitesse, les navires mus, par l’hélice sont déjà plus nombreux que les navires à roues. Ils donnent en effet, à tonnage égal, plus de place pour les marchandises, et, dégagés sur leurs flancs du poids et de la résistance qu’opposent les tambours des roues, ils profitent mieux des brises favorables. Les bâtimens à roues conservent la supériorité pour les courtes traversées, et surtout pour les communications qui exigent un faible tirant d’eau, l’hélice ayant besoin d’être profondément immergée pour exercer toute son action ; mais pour l’ensemble des transports le nouveau système de propulsion est destiné à se propager rapidement.

Les premiers steamers étaient presque entièrement dépourvus de voiles. Il semblait qu’il y eût antipathie entre la vapeur et le vent, et que l’invisible machine, installée au fond du navire, dédaignât