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s’attache en Angleterre aux délibérations du parlement. Et que penser aussi de ces curieux qui, sans billet, sans aucun espoir d’assister à la séance, attendent, rangés dans Westminster-Hall, le passage des députés se rendant à la chambre ? De moment en moment, les noms de Bright, de Gladstone, de Stuart Mill, de Disraeli, de lord Stanley, circulent dans un murmure étouffé d’un bout à l’autre de l’immense salle, tandis que les regards cherchent à lire les événemens de la soirée sur le front de ces hommes d’état qui portent les destinées de la Grande-Bretagne.

Quand des spectateurs en chair et en os, assis sur les bancs d’une galerie découverte, ne sont toutefois considérés que comme des ombres par les législateurs anglais, à plus forte raison la chambre est-elle censée ignorer la présence des femmes qui assistent aux séances dans une loge grillée. Autrefois elles étaient tout à fait exclues de l’enceinte de l’assemblée, et pourtant la curiosité avait fait découvrir à ces filles d’Eve un poste secret d’observation. Dans l’ancien palais des communes se trouvait, au-dessus du plafond, une chambre dans laquelle s’ouvrait un ventilateur. C’est par ce trou que les dames venaient regarder ce qui se passait dans la salle. Certes l’endroit était fort peu agréable, la chaleur et l’odeur des lampes y viciaient l’atmosphère ; pourtant cette chambre était toujours pleine, et l’on cite les noms de plusieurs ladies qui suivirent de longs débats dans l’horrible cachette. Tant de courage méritait une récompense, et quand s’éleva le nouveau palais du parlement, l’architecte, d’accord avec les autorités de la chambre, fit construire une loge pour les femmes. Seulement, comme les traditions s’opposaient à ce qu’elles se montrassent dans le temple législatif, on convint de les masquer derrière un grillage. Les députés peuvent faire entrer dans cette loge les femmes de leurs amis ; mais de telles places sont si recherchées qu’il faut quelquefois attendre plus d’une quinzaine à partir du jour où le nom a été écrit sur le livre de l’huissier. Cette ladies’gallery s’élève derrière celle des reporters et règne sur toute la largeur de la salle ; elle est étroite, mais comfortable à l’intérieur, et à côté se trouve un buffet où retentit le bruit des tasses et des cuillers d’argent, car les belles recluses ont le droit de se faire servir du thé et d’autres rafraîchissemens durant la soirée ? Est-ce par manière d’épigramme qu’on a écrit en toutes lettres dans la loge des dames : « Silence is required, on est prié de garder le silence ? » J’ai entendu des Anglaises se récrier contre l’impertinence de cet avis. A peine entrevues du dehors, elles ressemblent à des oiseaux en cage (soit dit sans allusion aux belles plumes ou aux vives couleurs qui leur servent d’ornemens) ; mais du moins c’est une cage dorée.

Que découvre-t-on pourtant de ces diverses galeries ouvertes au