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surtout dans les îles du nord, et qui en expose de nombreux échantillons, fournit en abondance les matériaux de ces constructions. La légèreté des demeures les met à l’abri des tremblemens de terre, si fréquens dans ces parages ; elle les expose en revanche aux dangers de l’incendie. Une cloche suspendue entre deux mâts au milieu des rues donne l’alarme en cas de sinistre. Ces cloches se fondent avec les alliages de bronze fournis par les minerais indigènes. Il s’en trouve une dans le parc de l’exposition ; on peut juger par cet échantillon de l’habileté des fondeurs japonais.

Outre la maison du parc, le Champ de Mars nous offre des réductions de divers autres genres d’habitations, celles-ci plus riches et plus spacieuses. Voici d’abord la demeure d’un bourgeois aisé de Yédo ou de Yokohama. Elle a deux étages, un escalier de bois monte de l’intérieur de la première pièce à l’étage supérieur, où loge la famille. Devant l’entrée une vérandah ; une cour à l’entour avec des communs. L’édifice est encore en bois. Des vases en porcelaine pleins de fleurs ornent la vérandah, mais l’intérieur de l’habitation reste absolument vide de meubles. On couche sur le plancher ; comme marque de richesse, des laques plus fines, des porcelaines de plus grand prix, des portraits, des tableaux ou plutôt des images coloriées pendant en longues bandes le long des murs, c’est là tout l’ornement.

Plus loin enfin se reproduit en petit modèle l’enceinte extérieure des palais que les daïmios occupent à Yédo. Dans cette vaste capitale, peuplée, dit-on, de deux millions d’âmes, et dont le plan, dressé par un ingénieur indigène avec la désignation des quartiers et l’alignement des rues, se voit à l’exposition, le palais du taïcoun occupe à peu près au centre un large espace de deux lieues de circonférence environ, qu’entoure un large canal ou plutôt un fossé plein d’eau, à pentes raides, et couronné d’un mur de fortification. Le mot palais ne saurait avoir ici le même sens qu’en Europe. Il s’agit d’un nombre considérable d’habitations distinctes renfermant les soldats, les divers officiers, toute la suite du taïcoun, et qui sont dispersées au milieu d’arbres et de jardins. La demeure réservée spécialement à la personne du souverain se trouve au centre. Nul étranger ne pénètre dans ce vaste îlot formant la ville sacrée. Au-delà du canal, une autre ville encore, celle des daïmios. Chacune des habitations qui leur appartiennent occupe un carré bordé sur chaque face par une rue ou ruelle. L’enceinte extérieure se compose d’une muraille de bois, percée d’ouvertures que ferment des châssis mobiles. Au milieu de la façade principale, regardant le palais du taïcoun, une large porte en bois massif s’ouvre entre des piliers pour donner accès sur des jardins remplis d’arbres et de