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adresser ses complimens et lui exprimer ses vœux pour le bonheur des jeunes époux ; mais je sais aussi qu’il faisait en même temps ses réserves en exprimant l’espoir que des théologiens plus heureux que lui avaient sans doute trouvé pour invalider le premier mariage des motifs qu’il n’avait pas pu découvrir. Voici d’ailleurs le texte de cette lettre du pape Pie VII à Napoléon Ier :

« Nous remercions bien affectueusement votre majesté pour la lettre très gracieuse et pleine des plus vives expressions de sa pitié filiale et de son attachement pour nous, par laquelle elle nous fait part du mariage célébré entre S. A. I. le prince Jérôme Napoléon, notre très cher fils et son très aimé frère, avec la princesse royale Catherine de Wurtemberg. Nous leur souhaitons de tout notre cœur non-seulement les plus grandes, mais encore les plus pures consolations. Tandis que nous louons le Seigneur pour tout le bien qu’il lui a plu de départir à votre majesté et à son auguste famille, nous espérons encore qu’après l’examen que nous avons fait des motifs qui ont été produits relativement à la nullité de l’autre mariage contracté par le prince impérial susdit, il peut s’être présenté de nouvelles et valables raisons qui, ne nous ayant pas été exposées alors, nous sont entièrement inconnues, ensuite desquelles s’en est suivie la célébration à laquelle votre majesté a participé. J’ai la confiance que ce sera une consolation pour cette amertume et cette inquiétude que devant Dieu et dans l’intimité de notre cœur nous ne pouvons nous empêcher de nous rappeler lorsque sur cette proposition nous avons écrit autrefois à votre majesté[1]….. »

Ce n’est pas cette démarche purement courtoise de Pie VII que son altesse impériale entend représenter comme l’équivalent d’un démenti donné à son jugement antérieur. Si le prince Napoléon pensait qu’il a prouvé l’assentiment définitif du souverain pontife parce qu’il a rappelé que le mariage du roi son père a été célébré en grande pompe aux Tuileries par le prince primat, assisté de plusieurs évêques, je l’engagerais, pour toute réponse, à se faire présenter la correspondance du cardinal Caprara, légat du saint-siège à Paris. Il y verra que ce membre du sacré-collège a été très vertement réprimandé par Pie VII pour avoir, justement à cette même époque, osé prendre sur lui d’officier au mariage de son altesse impériale la princesse de Beauharnais, qui était catholique, avec le grand-duc de Baden, qui était protestant. La lettre du pape est longue, rédigée en termes clairs et très sévères pour son représentant à Paris. La raison principale qu’il donne de son mécontentement, c’est que la présence du légat a pu faire croire à des personnes mal informées qu’il approuvait de

  1. Cette lettre a été écrite par Pie VII en italien ; nous donnons la traduction telle qu’elle existe dans les documens officiels français. La lettre est sans date, mais elle doit être du mois d’août ou de septembre 1807.