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les questions relatives à la validité de la saisie d’un livre ne sont pas au nombre de celles dont il appartient au conseil de connaître au contentieux. » Ainsi la juridiction civile et la juridiction administrative se renvoient l’une à l’autre la décision d’une question où le principe de la propriété est si manifestement impliqué. Entre les deux juridictions, une confiscation de propriété mobilière qui n’atteint pas seulement un banni, mais qui frappe un éditeur français, est maintenues. Un avocat distingué, M. Reverchon, ancien maître des requêtes au conseil d’état, vient de traiter cette question de compétence dans une étude approfondie sur la saisie administrative. Nous y lisons le passage suivant, qui frappera tous ceux qui s’inquiètent des intérêts supérieurs de la justice. « Deux des membres les plus éminens du conseil d’état, que je ne nomme pas ici, mais que j’espère pouvoir nommer, ailleurs, m’ont dit que cette jurisprudence constituait la plus énorme aberration juridique qu’ils eussent jamais rencontrée, en ce qu’elle avait fait d’une garantie personnelle (l’article 75 de la constitution de l’an VIII, qui couvre les fonctionnaires) une garantie réelle, et en ce qu’elle avait appliqué aux actes une protection qui n’était établie que pour les personnes. » L’intérêt que défendent le duc d’Aumale et M. Michel Lévy est bien grand, puisque c’est un droit de propriété méconnu par un acte de pouvoir extra-légal ; mais dans l’état du monde, dans l’état de l’opinion publique française, il est impossible de ne pas trouver étroites et mesquines les préoccupations auxquelles ont cédé ceux qui ont ordonné et qui maintiennent encore la saisie de l’Histoire des princes de Condé.

Nous n’aurions pas grand sujet de nous féliciter des visites princières reçues par la France, si elles étaient précédées, et suivies d’actes semblables à ceux au milieu desquels le roi de Prusse et M. de Bismark ont placé leur voyage à Paris. La veille de son départ de Berlin, M. de Bismark avait arrêté avec les états allemands du sud les arrangemens relatifs au nouveau Zollverein, qui font entrer les représentans de ces états dans le parlement fédéral du nord ; le lendemain de son retour, il signait une autre convention avec la Bavière resserrant encore l’alliance économique. Loin de nous la pensée de chercher des prétextes de récrimination contre la politique prussienne : on en trouverait assez, si par malheur un antagonisme naissait entre la France et la Prusse. On ne peut cependant s’empêcher de remarquer que M. de Bismark dans les progrès de son influence n’observe aucun ménagement envers la France. Les prodigieux avantages qu’il a obtenus auraient dû, ce semble, lui inspirer quelque modération. Il y a un an, on nous annonçait une confédération allemande du midi, dont la perspective a provoqué chez nous la théorie plus ingénieuse que durable des trois tronçons. Qu’est devenue la confédération du sud ? Un mois après Kœniggraëtz, tous les états du sud concluaient avec la Prusse une alliance militaire perma-