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Les principaux disciples de Van Hattem furent Jacob Bril, de Leyde (1639-1700), qui mena une vie paisible et toute hollandaise, mais en mystique de la primitive église ; il tourna en effet le spinozisme du côté du mysticisme, mais d’un mysticisme tout intérieur qui n’avait besoin d’aucun culte public ; — Marinus Adriansz Booms (vers 1728), cordonnier à Middelbourg, exclu de l’église à cause de ses tendances hattémistes[1] ; il fut même banni de la ville en 1714 et de la province de Zélande ; il mourut à Bréda, où il s’était réfugié, sans avoir jamais cessé de défendre le hattémisme par ses écrits ; — Dina Jans, surnommée le pasteur Dina, qui était servante de Van Hattem lorsqu’il était encore ministre à Philipsland ; elle travailla avec zèle à propager la doctrine de son maître ; elle était en grand honneur auprès de tous les hattémistes, dont beaucoup lui rendaient visite chaque année : elle fut excommuniée en 1728 ; — enfin Gosuinus van Buitendych, pasteur à Schore en Zélande en 1702, bientôt accusé et destitué par les états en 1709. On le voit alors associé avec Booms et tenant avec celui-ci des assemblées religieuses. Tous deux se rendent à Bréda, d’où Buitendyck est chassé en 1726, et deux ans après il l’est encore d’Amsterdam. Ces noms et ces faits nous montrent assez quelle a été l’importance et l’activité de l’hattémisme à la fin du XVIIe siècle et au commencement du XVIIIe. Quelques mots suffiront pour établir la parenté de cette doctrine avec le spinozisme.

L’erreur capitale du vulgaire, selon Van Hattem, est de se représenter Dieu et l’homme comme deux êtres séparés l’un de l’autre, de sorte que l’homme paraît être en dehors de Dieu, et Dieu en dehors de l’homme. Dans cet ordre des idées, qui est celui de la nature, l’homme pense Dieu objectivement comme l’être le plus accompli, comme une substance intelligente, toute-puissante, toute sage, etc. ; mais cette représentation objective de Dieu n’est pas le vrai Dieu : c’est une idole, c’est Satan. Cette erreur fondamentale doit être corrigée et guérie par la foi. La foi est la conscience de l’unité de l’homme avec Christ ou avec Dieu, Le croyant ne se prend pas lui-même pour un sujet en soi, mais pour une partie du tout, dont Christ est la tête, car Christ est le fondement de toute existence.

Les conséquences morales d’une telle théologie sont faciles à prévoir, et Van Hattem les admet sans hésiter. Pour lui, le seul péché, c’est de croire au péché. Ce que l’on considère en général comme une vertu, à savoir l’humilité, c’est le péché contre le

  1. Dans l’excommunication de Booms, le hattémisme est expressément rattaché au spinozisme.