Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 70.djvu/423

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ses collègues du sacré-collège. Il fallut lui rappeler qu’il avait été lui-même le premier à reconnaître que cela n’était pas possible. Il trouva fort mauvais alors qu’on ne lui eût pas communiqué les pièces soumises à la délibération du sacré-collège. Le secrétaire d’état lui fit remarquer que ces pièces n’étaient autres que sa propre dépêche et les lettres de l’empereur transmises par lui au saint-père ; il en avait donc une entière connaissance. Fesch était obligé d’en convenir, mais il répliquait qu’on lui avait manqué d’égards en ne les lui adressant pas officiellement comme aux membres de la congrégation. C’étaient là d’assez pauvres arguties. Consalvi lui faisant sentir qu’il avait tort d’y recourir et d’inventer après coup des torts qu’on n’avait pas eus envers lui ; Fesch, dans un moment de franchise, ne put s’empêcher de s’écrier « qu’il était bien obligé d’agir ainsi, sans quoi il ferait trop mauvaise figure auprès de son gouvernement. » La situation du ministre de France était d’autant plus incommode en effet, et son irritation d’autant plus grande en ce moment qu’il avait eu assez peu de clairvoyance, ou, pour mieux dire, assez de confiance en lui-même et dans son action personnelle sur le sacré-collège pour espérer au début un tout autre résultat. Il l’avait même presque annoncé à Paris. Depuis le jour où, partageant à son tour les préventions de son oncle, qu’il avait d’abord si vertement blâmées, Napoléon s’était mis à dénoncer Consalvi au saint-père, le cardinal Fesch n’avait plus douté d’obtenir bientôt de façon ou d’autre la chute d’un ministre qui lui était devenu personnellement antipathique. Ainsi que nous l’avons déjà plusieurs fois constaté afin de lui rendre, malgré ses emportemens de conduite, la justice qui lui est due, l’ancien chanoine d’Ajaccio, dans sa situation nouvelle, était au fond resté fidèle à tous les sentimens qui constituent le véritable prêtre. Comme tel, il avait en maintes occasions, particulièrement à propos des Légations, pris en secret parti pour le saint-père contre son propre neveu. Sa conscience ecclésiastique avait grand’peine à approuver, au moins dans la forme qui leur avait été donnée à Paris, les impérieuses exigences qu’il était, comme ambassadeur, chargé de soutenir à Rome. Il les avait toutefois non-seulement produites, mais défendues avec cette véhémence et cette obstination qui lui étaient habituelles, encouragé surtout par l’idée que le succès de ces demandes ne pouvait manquer d’entraîner la retraite de Consalvi. Consalvi tombé, le cardinal Fesch, confiant comme tous les membres de la famille Bonaparte dans l’ascendant de ses facultés personnelles, se faisait fort d’établir facilement son crédit sur l’esprit des membres du sacré-collège, sur celui du saint-père lui-même. Il arrangerait alors toutes choses pour le mieux au grand profit de l’empire et de l’église elle-même. Ces dispositions malveillantes de Fesch à son égard étaient depuis