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que les opérations, achevées en un endroit, sont transportées un peu plus loin. L’ouvrier n’a donc plus qu’à désagréger les terres et à les charger, et son travail est remplacé le plus souvent possible par l’action moins coûteuse de la vapeur. La tranchée du seuil est arrivée ainsi à des profondeurs inégales.

D’après un premier projet qui nous fut exposé sur les lieux mêmes, les entrepreneurs voulaient substituer promptement le dragage au système de l’excavation à sec ; ils devaient employer pour cela un procédé ingénieux, déjà mis en pratique sur un autre point : creuser une première tranchée à 2 mètres au-dessous du niveau des eaux du canal d’eau douce, y amener ces eaux douces par une dérivation et produire ainsi sur la longueur du seuil un bassin où flotteraient les dragues à une hauteur de 5 ou 6 mètres au-dessus du niveau de la plaine voisine. Les dragues dès lors se seraient mises à l’œuvre, creusant le bassin en envoyant les déblais sur la berge au moyen de couloirs, et l’amenant ainsi à une profondeur de 2 mètres au-dessous, du niveau de la plaine de Suez. La digue alors aurait été rompue, les eaux se seraient écoulées dans le canal maritime creusé à travers la plaine à une égale profondeur ; les dragues, descendues avec l’eau douce, se seraient trouvées flotter dans l’eau de la mer, et n’auraient plus eu qu’à reprendre leur travail pour amener le canal maritime à toute la profondeur requise.

Diverses considérations ont fait abandonner ce projet ; le chantier se trouvant installé, grâce au système que nous avons décrit, dans de bonnes conditions, le travail sera continué à sec jusqu’à la profondeur de 2 mètres, que nous venons d’indiquer, ce qui permettra de reporter un plus grand nombre de dragues sur d’autres points où cet engin peut seul être employé. Telles sont en substance les clauses d’une convention additionnelle qui vient de se conclure dans les premiers jours d’avril entre la compagnie et les entrepreneurs. Cette convention présente un autre intérêt : elle règle pour la première fois d’une façon précise le mode de travail à employer pour le passage des lacs amers.

On se rappelle qu’à la suite du seuil de Chalouf, avant d’arriver au Sérapéum, le canal traverse sur une longueur de 40 kilomètres la grande dépression connue sous le nom de lacs amers. Ce bassin se subdivise en deux parties, séparées par un endiguement naturel qu’un léger terrassement complétera ; la plus rapprochée du seuil de Chalouf, de beaucoup la plus faible, et portant le nom de petit lac amer, doit être creusée à sec, comme le seuil, sur tout le parcours du canal. En raison de la dépression naturelle du sol, qui dépasse en moyenne de 2 mètres le plafond de la future tranchée, ce travail représente un chiffre relativement très faible de déblais. Les grands lacs amers qui viennent ensuite, et dont la capacité est