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San-Rocco-di-Palazzolo. Villahermosa, sans se laisser intimider, entrait en action et disputait avec des chances assez inégales les hauteurs voisines de la route. Cerale apprit cet engagement en débouchant des défilés du Monte-Vento. Il avait au moins l’avantage de n’être point surpris. Il aurait bien pu, lui aussi, essayer de se reconnaître, communiquer avec Sirtori en informant le chef de son corps d’armée ; mais, soit qu’il ne crût pas encore à une résistance sérieuse, soit qu’il fût un de ces hommes à qui le péril ôte la réflexion pour ne leur laisser que l’entraînement du courage, Cerale n’avait plus qu’une idée, aller tête baissée se frayer à tout prix un chemin vers Castelnovo sans s’inquiéter de rien, — et il avançait, poussant devant lui le général de Villarey, qui à son tour rejoignait Villahermosa, déjà fort menacé par le déploiement des forces autrichiennes.

Arrivé à Oliosi, il ne pouvait méconnaître la gravité de la situation en voyant les feux ennemis se multiplier. Il ne continuait pas moins à marcher en tête de ses troupes, avec plus d’intrépidité que de prudence, ayant à ses côtés le général Dho, commandant de la brigade de Forli, lorsque tout à coup d’un chemin couvert débouchait une colonne autrichienne d’infanterie et de cavalerie. Un moment encore, et l’état-major italien était pris. Une escorte de guides put à peine le couvrir, animée au combat par le général Dho, qui reçut trois coups de lance. En même temps apparaissait sur la droite une autre brigade autrichienne, celle de Piret. Ce qui en résulta, ce fut un mouvement subit de retraite qui se communiqua à la colonne italienne tout entière et dégénéra bientôt en confusion, les bataillons se rejetant les uns sur les autres, les soldats se débandant de toutes parts. Le malheureux Cerale, l’épée à la main au milieu du feu, essayait vainement de raffermi !: sa colonne et de ramener ses hommes ; il tombait atteint d’une dangereuse blessure. Le général Villarey à son tour s’efforçait de rétablir le combat, et au moment où il se jetait en avant il était mortellement frappé auprès de son fils, qui lui servait d’aide-de-camp.

En un instant, les trois généraux de division se trouvaient hors de combat. Le colonel Dezza restait le commandant de cette malheureuse colonne, dont il rassemblait intrépidement les tronçons pour tenir encore l’ennemi en respect. Tout ce qu’il pouvait tenter évidemment, c’était de se défendre en se repliant et de retarder la marche des Autrichiens. En apparence, le désordre était grand sans doute ; cette infortunée division avait été la victime d’une de ces paniques auxquelles sont exposées toutes les armées. Malgré tout cependant, même dans cette confusion, ce n’est pas le courage qui manquait. Parmi ces soldats débandés, beaucoup, réunis par groupes, s’étaient dispersés dans les fermes, multipliant la résistance, fatiguant les Autrichiens, et plus d’un de ces obscurs combats révélait