Page:Revue des Deux Mondes - 1867 - tome 69.djvu/761

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

frapper l’œuvre historique d’un soldat et d’un lettré français, éconduite non pour des motifs de droit commun, mais par mesure de haute police ; toutes les juridictions l’ont avoué, et le conseil d’état le répétait dans son arrêt ? Au moment où les peuples et les chefs de gouvernement, se rapprochent dans la solennité pacifique célébrée par la France, une haute place dans cette concurrence universelle devrait bien être réservée aux sentimens, aux actes, aux manifestations du libéralisme.

Si les étrangers s’intéressent au jeu de nos institutions politiques, il faut convenir que nous avons à leur présenter cette année peu de sujets d’imitation et peu de motifs d’envie. Les inconvéniens de notre système de travail parlementaire éclatent dans cette session avec une évidence qui démontre la nécessité d’un changement prochain de méthode. Quatre mois se sont écoulés, et aucun des grands projets de loi qui devaient donner tant d’occupation à l’activité des chambres n’a été encore abordé par la discussion publique. Tout est demeuré enfoui jusqu’à présent dans les études secrètes des commissions ; nous sommes en vérité bien arriérés dans l’art d’expédier les affaires. Ce n’est point à la nonchalance des hommes publics, c’est aux vices d’un système qu’il faut attribuer les incroyables lenteurs et l’apparente oisiveté de nos assemblées. Ce qui fait défaut, c’est la responsabilité et l’initiative. Qui pourra nous dire sur qui repose la responsabilité de la conduite des travaux de la chambre ? Quand on se tient au courant des travaux du parlement anglais, on remarque que des explications sont fréquemment échangées, entre le ministre leader de la chambre des communes et les principaux membres de l’opposition, touchant les époques à fixer pour la discussion des bills et des mesures importantes présentées par le gouvernement. On se concerte pour arrêter l’ordre des lois à débattre ; on fixe des jours, on s’entend même souvent sur le temps qui sera donné à la délibération. Entre le cabinet et l’opposition, il y a émulation pour bien faire et pour faire vite. En ce moment à Londres, le vote du budget, dépenses et recettes, est déjà fort avancé. De longues et décisives discussions ont eu lieu sur les principales dispositions du bill de réforme, mesure vaste et compliquée qui est, à proprement parler, un remaniement de la constitution anglaise. Cependant M. Disraeli ne craint point de demander un surcroît d’activité et d’assiduité à la chambre des communes. Elle vient de décider que deux jours par semaine les séances seraient doubles. La première durerait de deux heures de l’après-midi à sept, la seconde commencerait à neuf heures du soir, et M. Disraeli a déclaré avec son enjouement ordinaire qu’il espérait bien que la chambre ne refuserait point de pousser la séance du soir jusqu’à deux heures après minuit. Voilà un pays où, grâce à la responsabilité ministérielle combinée avec l’initiative parlementaire, on sait rendre les discussions actives et fécondes. A aucune époque en France, on n’a étudié d’assez près, le côté des nécessités et des moyens pratiques propres au gouvernement représentatif. Des erreurs