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l’autre. L’appel n’a pas été vain, et depuis lors en Angleterre et en Allemagne ont commencé les recherches du traitement direct de l’acier. L’enjeu était beau ; il s’agissait d’ouvrir pour un nouveau métal une campagne à peu près aussi fructueuse que celle dont le fer atteignait le terme, et où se montraient en perspective des bénéfices équivalens. L’exposition témoigne que de vigoureux efforts ont été faits, et que sur divers points, notamment à Imphy, à Assailly et à Terre-Noire, de bons résultats ont été obtenus ; au Creusot, on en est aux études.

Ce n’était pas une médiocre difficulté que de faire sortir directement de la fonte, quelle qu’elle fût, et par grosses charges un acier qu’on n’obtenait autrefois que par petites chargés et au moyen de fontes ou de fers d’exception. Il n’y avait et il n’y a encore, il faut le dire, dans toutes ces opérations que des manipulations empiriques : autant de fabriques, autant de genres de cémentation. Sur la composition chimique, l’obscurité est toujours très profonde nonobstant les recherches persévérantes de M. Frémy : comment concevoir que quelques centièmes de carbone dans la fonte et quelques millièmes dans le fer puissent donner des métaux tout à fait différens ? Aussi cherchait-on un peu partout les raisons du phénomène qui frappait d’inégalité des aciers en apparence identiques, dans la vertu des eaux par exemple ou celle des bains mélangés qui y suppléent. La variété même des procédés employés indiquait le trouble qui régnait dans les traditions et les usages. Tantôt, comme en Suède, on tirait l’acier de fontes au bois traitées au bas foyer : c’était l’acier naturel, le meilleur de tous ; tantôt, comme en Angleterre, on cémentait de bons fers en leur restituant à l’état solide la proportion de carbone nécessaire pour en composer des aciers ; enfin on avait imaginé de fondre soit l’acier de cémentation, soit l’acier naturel dans des creusets réfractaires portés à une haute température à l’abri de l’action de l’air : c’est ce qu’on nommait l’acier fondu, plus homogène que les précédens, mais moins facile à souder. Tout récemment un pas de plus a été fait en dehors de ces trois méthodes. Dans des fours qui servent habituellement au traitement du fer et en employant la houille pour combustible, on a traité des fontes ordinaires en évitant une décarburation complète : c’est ce qu’on a nommé l’acier puddlé. Voici déjà une abondante collection de manières d’opérer ; il ne reste plus, pour que la liste soit complète, qu’à y ajouter celle qui a pris le nom de son auteur, un Anglais, M. Bessemer.

Le procédé Bessemer est simple en principe et non moins simple dans l’application. L’inventeur au début avait annoncé que l’acier y serait obtenu sans dépense de combustible ; c’était jouer sur les