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comme il en faut encore dans les grandes cités. On se contente de placer sous le pavé des rues des tubes en poterie d’un diamètre relativement médiocre. Les petites localités de l’Angleterre sont donc en avance sur celles de notre pays, et la propreté de la voie publique contraste avec ce que nous ayons coutume de voir en France autour de nos habitations. Ce n’est pas seulement l’intérieur des cités qui a été doté de moyens spéciaux d’égouttage ; les longs faubourgs qui s’étendent autour des centres industriels jusqu’à plusieurs kilomètres de distance, bordés de chaque côté par d’élégantes maisons où les négocians se retirent après l’heure des affaires, sont toujours pourvus d’un canal souterrain où les eaux sales et les eaux pluviales vont se perdre. Les grandes villes, où l’œuvre du nettoyage est une entreprise plus difficile, ont fait aussi de coûteux travaux d’assainissement. Cependant ce n’est pas là qu’il faut aller chercher un exemple de drainage bien complet parce que l’ensemble reste souvent imparfait. Les villes de la Grande-Bretagne, et surtout la métropole, se divisent en paroisses, dont les administrations distinctes savent rarement s’entendre et coordonner leurs travaux en un projet commun. À Paris au contraire, grâce à un plan bien conçu, on trouvera le modèle de ce qui peut être exécuté de plus achevé sous ce rapport.

Il semblerait tout d’abord qu’une ville assise, comme l’est Paris, sur les deux rives d’un grand fleuve, doit se débarrasser sans peine des immondices qui la souillent, en dirigeant ses ruisseaux et ses égouts vers le puissent cours d’eau qui la traverse. Il en fut longtemps ainsi. Le fleuve était l’émissaire de toutes les impuretés de l’ancien Paris. Les fossés d’écoulement n’étaient d’ailleurs aux siècles passés que ce qu’ils sont encore en beaucoup de villes, de simples rigoles creusées à travers les rues ou les champs en culture, des sentines infectes où les eaux déposaient la fange dont elles étaient surchargées. Le premier progrès fut d’en niveler le lit et en maçonner les parois. En 1374, Hugues Aubriot, prévôt des marchands, fit mieux encore ; il couvrit d’une voûte la plus importante de ces rigoles, et en fit par conséquent quelque chose d’analogue à nos égouts actuels. Toutefois, soit que cette amélioration fût peu appréciée ou soit qu’elle parût trop onéreuse, les galeries souterraines prirent peu d’extension. Le ruisseau de Ménilmontant, qui coulait de l’est à l’ouest entre la butte Montmartre et la butte des Moulins, et dont l’assainissement devait importer au plus haut point à la salubrité publique, ne fut revêtu de murs et voûté qu’au milieu du XVIIe siècle. On l’appela dès lors grand, égout de ceinture, nom qu’il conserve, bien qu’il ne joue plus qu’un rôle secondaire dans l’ensemble du drainage parisien. Pendant la première moitié de notre siècle, tous les égouts à ciel ouvert disparurent : la