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culture est un remède imparfait qui ne mérite pas de fixer l’attention. « Toute mauvaise odeur dans l’habitation, dans la rue, dans la ville, disait en1850 un rapport du Board of health, signale une atteinte à la santé publique, et dans la campagne une perte d’engrais. » Cette vérité, que les Anglais ont élevée à la hauteur d’un principe, fait déjà pressentir la solution qu’ils ont adoptée.

Les Anglais sont aussi arrivés à cette conclusion, que le meilleur moyen de rendre inertes les germes de fermentation putride est de les noyer dans une grande quantité d’eau. Diluer à l’infini les matières excrémentitielles, c’est leur enlever leur redoutable efficacité ; mais ne va-t-on pas se heurter à un autre inconvénient ? Les répugnantes opérations de la vidange deviendront d’autant plus fréquentes que les réceptacles, déjà transformés en citernes étanches par de sages règlemens de police urbaine, vont se remplir plus vite. Le préfet de la Seine constatait en 1854 le mauvais vouloir des propriétaires parisiens à introduire les concessions d’eau à tous les étages de leurs maisons, parce qu’il en résultait au bout de peu d’années une dépense plus considérable d’épuisement des fosses. En définitive, il faut une réforme complète. En attendant que nous arrivions au moment de l’exposer, nous n’avons voulu que signaler en passant l’eau comme un puissant moyen d’assainissement. Le principe étant posé, les conséquences s’en dégageront d’elles-mêmes.

Quand on s’occupe de cette question, ce serait en négliger l’un des côtés les plus importans que de ne pas tenir compte de la lourde dépense que le système le plus commun en France impose aux propriétaires et de la valeur très réelle de cette singulière marchandise. On estime que le mètre cube de vidange coûte à Paris 8 fr. d’extraction ; c’est environ ce que fournit chaque personne adulte en une année. Il en résulte en somme un impôt annuel de 10 à 12 millions, impôt dont ne profitent ni le gouvernement, ni la ville, ni les individus. D’autre part, ce mètre cube vaudrait 12 à 15 fr. en tant qu’engrais ; mais, comme on en utilise à peine la dixième partie sous forme de poudrette et de sels ammoniacaux, il y a une autre perte plus considérable que la première. Les Flamands et les Hollandais, à qui l’on reproche quelquefois par ironie de manifester trop de préférence pour ce mode d’engraisser la terre, ne dédaignent pas les revenus qu’ils en savent extraire. En réalité, tout le monde ne partage-t-il pas sous ce rapport l’opinion de Vespasien ? À Anvers, l’exploitation des vidanges, faite au profit du trésor communal, a rapporté de tout temps des sommes considérables. Le bénéfice actuel, bien que réduit par la concurrence du guano américain, s’élève encore à 80,000 francs. À Louvain, la ville en retira 15,000 francs, 20,000 à Arnheim, 40,000 à Groningue. Dans toute