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par voie de persuasion. Au contraire, ce qui est susceptible d’influer sur la santé de tous est devenu l’un des soucis les plus graves de l’autorité. La tendance qu’ont aujourd’hui les hommes à se déplacer au profit exclusif des grandes villes, le développement immense de l’industrie, qui traite comme une matière inerte les substances les plus nuisibles dont se compose l’écorce de notre planète, en aggravant les sujets d’infection propres à toute agglomération humaine, ont créé le devoir de protéger la population contre des causes multiples d’insalubrité. De là tout un système de règlemens préventifs ou répressifs, tantôt anodins, tantôt sévères, suivant que l’on craint d’entraver l’industrie et la liberté des citoyens, ou que l’on se laisse effrayer par des accidens épidémiques. Toutefois l’essence même de cette législation est de devenir de plus en plus rigoureuse. Tout y convie : le raffinement des mœurs, qui ne supporte plus qu’avec peine ce qui blesse les sens de la vue et de l’odorat ; les études médicales, en assignant à l’oubli des précautions hygiéniques une part très large dans le développement des maladies ; les progrès même de l’industrie, qui se perfectionne en s’assainissant et apprend à mettre en œuvre les résidus les plus abjects. Lorsque les médecins eurent démontré par des statistiques sérieuses que le choléra s’abat de préférence sur les quartiers humides et fangeux des grandes villes, les administrateurs, soutenus par l’opinion publique, se sentirent le courage de nettoyer, purifier et aérer au prix de coûteux travaux les rues qu’habite la population pauvre. Il n’est pas jusqu’aux embellissemens de luxe en certaines parties de la cité qui n’aient, par voie de contraste, imposé comme un plus rigoureux devoir la recherche de conditions hygiéniques meilleures.

Il est à regretter sans doute que ces travaux n’aient pas toujours été exécutés avec une entente parfaite de ce quel réclame la salubrité. Parfois aussi les travaux d’apparat ont eu le pas sur ceux qui sont simplement utiles. On n’a guère le droit de s’en plaindre, car l’hygiène industrielle et municipale est une science de date si récente qu’il est permis aux administrations les plus éclairées de n’en pas connaître les vrais principes. Afin de répandre la lumière sur cet important sujets le ministre de l’agriculture, du commerce et des travaux publics, sur l’avis du comité consultatif des arts et manufactures, a chargé un ingénieur des mines, M. de Freycinet, d’étudier tant en France qu’à l’étranger les améliorations relatives à la salubrité des fabriques et des villes ; nous allons essayer d’exposer l’état actuel de la question d’après les savans rapports qui résument les résultats de cette mission.

C’est une étude dont il n’est pas besoin de démontrer l’utilité, car on ne manque pas d’occasions, sans aller loin, d’apercevoir bien