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leurs-généraux des finances ne la repoussaient pas absolument. Quelques années avant la publication des maximes économiques, M. de Machault avait entrepris de nombreuses réformes dans ce sens, et le contrôleur-général d’alors, M. de Silhouette, songeait à soumettre toutes les fortunes, sans exception de corps ni de privilèges, à ce qu’il appelait une subvention générale qui devait atteindre à la fois les revenus des biens fonds et ceux des richesses pécuniaires ; mais ces projets, tenus en échec par la résistance du parlement, avaient dû être ajournés à cause de la guerre, qui absorbait tous les ans 150 millions en sus des revenus.

« 6. — Que les avances des cultivateurs soient suffisantes pour faire renaître annuellement par les dépenses de la culture des terres le plus grand produit possible ; car, si les avances ne sont pas suffisantes, les dépenses de la culture sont moins grandes à proportion et donnent moins de produit net. »

Cette maxime paraît tout d’abord en contradiction avec la précédente. N’est-ce pas tarir à leur source les avances agricoles que de faire supporter par l’agriculture tout le poids de l’impôt ? Quesnay répondait que l’impôt, sous quelque forme qu’il fût perçu, finissait toujours par retomber sur le sol, et que le seul moyen d’alléger le fardeau était de réduire la somme totale, ce qui avait le malheur d’exiger une démonstration difficile. Loin de réduire les avances des cultivateurs et le produit net des propriétaires, il voulait avec passion les accroître. On croyait généralement avant lui que la nature fait à elle seule presque tous les frais de la production agricole ; il a réfuté énergiquement cette erreur, et le temps n’a rien ajouté à son analyse des différens capitaux qui concourent à la production. Ces capitaux, disait-il, sont au nombre de trois : les avances foncières, qui sont faites par les propriétaires et qui consistent en bâtimens, chemins, clôtures, plantations, défrichemens, etc. ; les avances primitives de l’exploitation, qui sont faites par les cultivateurs et qui consistent en bestiaux, machines, etc. ; les avances annuelles, également faites par les cultivateurs, et qui consistent en semences, labours, engrais, salaires, etc. Le cultivateur doit en premier lieu prélever sur les récoltes la somme nécessaire pour se rembourser de ses avances annuelles et pour entretenir ses avances primitives, avec la juste rémunération de son travail et la juste compensation de ses risques ; c’est ce qu’il appelle les reprises du cultivateur. Plus ces reprises sont assurées, plus la production s’accroît.

Mais si l’agriculture ne produisait pas davantage, la société ne pourrait se composer que de la classe agricole ; il faut encore pourvoir aux besoins du reste de la population, c’est-à-dire des hommes