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commission du corps législatif, tous patriotes sincères, seront sans doute plus disposés à fortifier nos institutions éprouvées qu’à les sacrifier à des systèmes venus, de Suisse, de Prusse ou d’Amérique. Ils comprendront la nécessité de mettre le plus tôt possible un terme à l’anxiété du pays et de l’armée.

De longues épreuves ne nous ayant pas fait un esprit enclin au dénigrement, nous demeurons persuadé que, dans les vices de l’époque, l’armée n’a pas la part la plus large. Plusieurs de ses imperfections, — elle en a de nombreuses comme toutes les armées de l’Europe, — seront facilement corrigées par l’habile ministre qui, supérieur aux préjugés ordinaires aux hommes vieillis dans une spécialité, aura l’ampleur des vues et la ferme volonté d’un véritable organisateur. Nos vœux les plus sincères et la reconnaissance du pays l’accompagneront dans sa noble tâche.

Malgré l’état critique de l’Europe, conservons notre sang-froid. Occupons-nous du couronnement de l’édifice ; faisons envier notre bonheur ; faisons admirer nos libertés, sans les croire capables de pacifier à jamais l’univers. Ne nous ruinons pas en armemens désordonnés. Ne provoquons personne, et demeurons persuadés qu’appuyée sur une vaillante garde nationale mobile qui, avant l’appel de la loi, n’aurait rien coûté au trésor, une armée d’un effectif relativement, médiocre, fortement constituée, instruite, commandée par des généraux désintéressés de tout, sauf de la patrie et de la gloire, saurait faire repentir de leur témérité ceux qui, confians en leur nombre, manqueraient de respect à notre pays, dont le renom ne date pas d’hier.

Quand nos institutions militaires sont en discussion, nos soldats se seraient étonnés du silence de ce général exigeant, difficile à satisfaire, en qui ils avaient reconnu un serviteur ardent de la France, un ami passionné de leur gloire.


CHANGARNIER.

Paris, le 5 avril 1867.