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avantageusement compensée par l’habileté du général et par la meilleure composition des troupes. Au-delà d’un certain chiffre, il n’y a point de bonne armée, point d’armée dont on puisse assurer la subsistance et bien diriger les mouvemens. Celle qui en 1812 entra en Russie était réduite de plus de moitié avant d’atteindre Moscou. Quand cette gigantesque et lamentable expédition eut complété la ruine de nos vieilles bandes, déjà usées par des guerres incessantes, Napoléon sut encore réunir des conscrits très nombreux et leur faire compter quelques journées glorieuses. Malheureusement cette jeunesse, toujours dévouée, toujours brave, mais inhabile à prendre soin d’elle-même, fut encore plus cruellement traitée par le bivouac, par les marches prolongées, par la maladie, que par les champs de bataille qui se nomment Lutzen, Bautzen, Dresde, Leipsick, Hanau…


VII

Observons attentivement les nouveautés partout où elles se produisent. Adoptons-les, si elles sont utiles ; mais défions-nous des engouemens irréfléchis. Les progrès de la mousqueterie, dont un officier de l’infanterie française, M. Delvigne, a donné, il y a trente ans, le signal, ne se sont pas arrêtés depuis cette époque. On croit généralement qu’ils ont diminué l’importance de la cavalerie. Le doute à cet égard est permis. La cavalerie a peu fait en Crimée, elle n’a rien fait du tout en Italie. Toutefois son rôle n’est pas fini, nous aurons encore des généraux capables de s’en servir pour éclairer la marche de l’armée et pour compléter la victoire. Si notre cavalerie n’est pas celle qui conserve le mieux ses chevaux, on ne peut sans injustice lui contester le goût de la charge à fond. A Marengo, à Eylau, elle a traversé de vaillantes troupes qui se croyaient victorieuses. Les vastes plaines où elle aurait beaucoup à souffrir du feu de l’infanterie, lui seront peut-être moins favorables désormais que les terrains ondulés où, après l’avoir longtemps dérobée à la mousqueterie et au canon, on pourra la faire apparaître et la jeter à propos sur les masses ébranlées.

Notre gouvernement a raison d’encourager les courses. Pourquoi donc, après avoir vu tenir compte d’une légère différence de poids entre des jockeys artificiellement amaigris, continue-t-on de surcharger inutilement des chevaux qui, même fatigués et mal nourris, ont à certains momens besoin de vitesse ?

La force et la confiance de nos cavaliers doivent être et sont en effet dans leur sabre ou dans leur lance. Excepté en Algérie, ils