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les massifs boisés contribuent par leur présence à abaisser la température. Cette action, qui a été longtemps contestée, parce qu’elle est souvent masquée dans les climats tempérés par des circonstances locales, est très sensible, dans les climats chauds, et trouve d’ailleurs dans les derniers travaux sur l’unité, dès forces physiques une confirmation théorique très précieuse. Les feuilles des arbres décomposent l’acide carbonique contenu dans l’atmosphère, en absorbent le carbone et en rejettent l’oxygène ; or ce phénomène est toujours accompagné d’un abaissement de température, de même que la combustion, qui est reconstitution de cet acide carbonique au moyen du carbone du bois et de l’oxygène de l’air, est accompagnée d’un dégagement de chaleur. On peut donc considérer les forêts comme d’immenses appareils destinés à enlever à l’atmosphère une partie du calorique qu’elle renferme, pour l’emmagasiner dans les tissus ligneux, sauf à le lui restituer quand une fois les arbres abattus sont employés à nos usages domestiques.

On ne saurait se dissimuler cependant que la tâche du gouvernement anglais ne soit des plus ardues, car son action ne s’étend que sur un nombre relativement restreint de forêts, et beaucoup d’entre elles non-seulement sont dépourvues de toute surveillance, mais n’ont même pas encore été reconnues ? Quelques-unes sont d’un abord tellement difficile et dangereux quelles indigènes eux-mêmes ne s’y aventurent pas ; telle est par exemple l’immense forêt qui couvre une partie du delta du Gange, et qui n’aurait pas moins, paraît-il, de 1,500,000 hectares. Lorsque les pluies ont fait fondre les neiges de l’Himalaya, les torrens qui descendent des montagnes charrient une énorme quantité de terres dont ils encombrent le fleuve. Celles qui ne sont pas déposées sur les bords sont entraînées vers la mer, et forment un sédiment qui recule chaque année les bornes du delta et dont la végétation prend aussitôt possession. Ces forêts marécageuses, outre qu’elles sont peuplées d’alligators, de serpens, de tigres et autres animaux dangereux, sont tellement insalubres qu’on les considère comme le foyer originaire du choléra ; aussi ne pourra-t-on songer à les exploiter que lorsque d’immenses travaux d’assainissement en auront rendu le séjour moins pernicieux.

Chaque année cependant de nouvelles reconnaissances ont lieu dans des régions jusqu’alors inexplorées, et de nouveaux massifs sont incorporés au domaine public. M. Cleghorn nous donne dans son ouvrage le journal d’une de ces excursions entreprise par lui en 1858 dans la partie la plus élevée de la chaîne des Anamalaï, dans la province de Madras. L,excursion dont il s’agit avait pour objet l’exploration de la chaîne méridionale des Anamalaï