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essentielles, aujourd’hui hors de cause, alors fort contestées, de poser d’un seul coup les bases de l’organisation militaire, qui, ne l’oublions pas, était à construire tout entière, enfin de faire passer dans l’ensemble des mesures qu’on ne pouvait espérer de voir accepter en détail.

L’article premier présentait un artifice de rédaction commandé par le sentiment public et par les déclarations antérieures de Louis XVIII : le mot de conscription n’était pas prononcé; l’engagement volontaire apparaissait comme l’élément principal du recrutement, l’appel comme le moyen subsidiaire. L’effectif de paix était fixé à 240,000 hommes et devait être complété par des levées anuelles qui ne pouvaient dépasser 40,000 hommes. Le contingent était réparti entre les départemens, arrondissemens et cantons suivant le chiffre de la population, et formé au moyen d’un tirage au sort entre les jeunes gens de vingt ans, le minimum de la taille de 1m 57. Les exemptions et dispenses étaient sagement définies et laissées à l’appréciation d’un conseil de révision qui donnait à l’état et aux intéressés des garanties suffisantes. Les engagemens devaient être gratuits, les « primes » étaient proscrites, et les rengagemens ne donnaient droit qu’à une haute paie. Le remplacement était autorisé sans intervention administrative, sauf pour constater l’aptitude du remplaçant; le remplacé restait responsable pendant un an pour le cas de désertion. La durée du service était de six ans à compter du 1er janvier de l’année où avait eu lieu l’incorporation; l’époque des libérations était fixée au 31 décembre, sauf les circonstances de guerre. Les appelés ou remplaçans étaient tous incorporés, mais pouvaient être laissés dans leurs foyers, pour être mis en activité au fur et à mesure des besoins. En cas de besoins plus grands, il devait y être pourvu par une loi spéciale.

Telles furent les principales dispositions contenues dans les trois premiers titres de la loi du 10 mars 1818. Nous avons dû les indiquer avec quelque détail, car la plupart figurent encore dans les lois qui règlent le recrutement de l’armée. Le titre IV instituait les « vétérans, » réunissait sous ce nom les sous-officiers et soldats libérés, et tout en leur laissant la faculté « de se marier, de former des établissemens, » leur imposait un « service territorial » qui devait durer six ans, mais ne pouvait être exigé qu’en temps de guerre; même en ce cas, il fallait une loi pour qu’ils fussent requis de marcher hors de la division militaire. Cette institution, définie dans les termes que nous venons de reproduire, avait un objet immédiat qui devait se transformer dans l’avenir. L’hostilité contre la France paraissait survivre, dans les desseins de plusieurs cabinets, à la chute de l’empire; une nouvelle collision pouvait être prochaine; Saint-Cyr voulait assurer à notre jeune armée le concours