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douze cents chevaux qu’il conduisait en Italie, et lui-même, monté sur la galère capitane d’André Doria, se rendit le mercredi 28 juillet à Palamos, non loin de Barcelone, d’où il se dirigea vers Gènes. Il avait passé toute la journée du 27 à donner des ordres pour le gouvernement de l’Espagne, qu’il laissait à l’impératrice Isabelle entourée de conseillers expérimentés, et il conduisait avec lui, pour le seconder en Italie, son principal ministre, le chancelier Gattinara, récemment nommé cardinal par Clément VII.

Pendant que Charles-Quint s’avançait vers les côtes d’Italie, François Ier levait des troupes, en annonçant l’intention de franchir de nouveau les Alpes à la tête d’une armée considérable. C’est ce qu’il assurait à ses confédérés, qu’alarmait extrêmement la reprise des négociations. Les Vénitiens craignaient d’être laissés à la merci de l’empereur après avoir dépensé, comme ils le disaient, des millions d’or pour soutenir la cause de la France et travailler à l’indépendance de l’Italie. Francesco Sforza, plus épouvanté encore, se voyait bientôt dépouillé du duché de Milan par le dominateur irrité qui pourrait donner un libre cours à son mécontentement et à son ambition. Le duc de Ferrare gémissait de s’être trompé cette fois en abandonnant celui qui devait être victorieux et en s’alliant avec celui qui devait être vaincu. Comment échapperait-il aux ressentimens de l’empereur, et ne serait-il pas tout au moins, malgré la flexibilité de ses retours, contraint de restituer les villes qu’il avait enlevées au saint-siège? Mais ceux qui éprouvaient les plus vives craintes étaient les républicains de Florence. Redevenus libres par un soulèvement, entrés dans la ligue avec ardeur, ayant levé beaucoup de troupes et fait de grands sacrifices d’argent pour la défense commune, il se sentaient perdus, si leur puissant allié cessait de les soutenir. Ils comprenaient que leur république ne pourrait pas résister longtemps aux forces réunies de l’empereur et du pape réconciliés, et qu’ils seraient remis sous le joug des Médicis. Aussi tous les ambassadeurs des états italiens entrés dans la ligue redoublaient de prières pour que la guerre fût continuée, ou que la paix ne se fît pas à leur détriment.

François Ier s’attachait à ranimer leur confiance. Ayant réuni les ambassadeurs de Venise, de Florence, de Milan, de Ferrare et de Mantoue à Compiègne, il les entretint de leurs communes affaires et régla les contingens qui seraient fournis par chaque état pour la reprise de la guerre. Outre les hommes d’armes et l’artillerie de France, il devait y avoir au-delà des Alpes quarante mille hommes d’infanterie, dont treize mille seraient à la solde des Vénitiens[1]

  1. Lettres de l’ambassadeur florentin Carducci aux dix de la liberté, des 17 et 23 juin 1529. — Négociations diplomatiques de la France avec la Toscane, vol. II, p. 1059 à 1068.