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Il entretenait ensuite le grand-maître de son retour à la santé, et lui disait : « Je suis si très bien de ma personne qu’il ne seroit possible de mieulx, et vous puis asseurer plus amendé depuys quatre jours que je n’avois fait en quinze jours auparavant, en façon que je ne connois plus ni ne sçais que c’est de mes médecins ni de mes chirurgiens, car je ne parle plus à eux; ce que vous ferez bien entendre à Madame et à ma sœur : ce leur sera nouvelle très agréable, et leur dites davantage que j’ai été depuis votre partement à la chasse aux toilles par deux ou trois fois, et que je me promène tout le jour parmi mon bastiment et par mes jardins, me trouvant en aussi bonne disposition que je fus oncques, et me sens fortifier de toutes heures, dont je loue Dieu le créateur. »

Au moment où François Ier se réjouissait ainsi du rétablissement de ses forces et se félicitait du progrès de ses affaires, ses affaires entraient en déclin dans le sud de l’Italie. La conquête si avancée du royaume tenait à la prise de Naples, la prise de Naples à la reddition de l’armée qui défendait cette importante ville, et la reddition de l’armée impériale affaiblie au défaut croissant de subsistances et à l’abattement final des courages. Malgré leurs murmures et leurs privations, les soldats de Charles-Quint avaient soutenu le siège avec une constance qui ne s’était pas ébranlée. Les mois de mai et de juin avaient été traversés par eux péniblement, mais sans que leur volonté fléchît et sans que se ralentissent leurs tentatives de ravitaillement. Ils faisaient surtout leurs sorties vers le sud par la trouée qui restait encore entre la tranchée française et. la mer. Ils en rapportaient quelques vivres qui les aidaient à se maintenir. Ils étaient au commencement de juillet dans cette position difficile qui les aurait à la longue obligés de mettre bas les armes, lorsque le blocus se relâcha tout d’un coup. Le 4 juillet, Philippino Doria abandonna le golfe de Naples par le commandement d’André Doria, son oncle, auprès duquel il se rendit dans le golfe de la Spez4a avec les galères génoises. Cette retraite fut désastreuse; elle commença la ruine de l’expédition française. En laissant ouvert le passage, que gardèrent fort mal les galères vénitiennes, peu vigilantes et mal armées, et qui partirent bientôt elles-mêmes pour aller renouveler leur biscuit sur la côte de l’Adriatique, elle permit d’introduire par là des vivres dans la ville assiégée.


IV.

Le départ de la flotte génoise eut pour cause une rupture survenue entre François Ier et André Doria. Cette rupture, dont les effets s’étendirent à tout le reste du règne de François Ier, fut une des