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par les faits actuels vus en beau. Son mobile est celui que les Anglais suivent volontiers et qu’ils nomment expediency, le possible actuel. Il ne subit point d’avance la loi des principes supérieurs de la politique; mais il ne décourage point non plus ceux qui cultivent la vertu de l’espérance, et il les ajourne à l’épreuve et à la date du possible. Il s’est joué autour des difficultés que soulève l’organisation de la souveraineté populaire en face du pouvoir constituant concentré en permanence dans un gouvernement personnel : il n’a pas paru songer aux argumens cette fois tout pratiques qui s’élèveront contre le gouvernement personnel dans les débats auxquels devront donner lieu et notre situation politique extérieure, telle que l’ont faite les événemens d’Allemagne, et la loi sur l’armée, et les résultats de l’entreprise mexicaine.

Ceux qu’a désappointés l’issue de l’interpellation sur la politique générale ne doivent point oublier que de nombreuses et vastes questions attendent une solution prochaine, et que la présente session est destinée à être une des plus laborieuses qu’on ait vues depuis longtemps. Il y aura des interpellations sur les affaires extérieures et sur le Mexique, puisque le gouvernement les a acceptées d’avance par une note insérée au Moniteur. De grandes lois politiques, la loi sur la presse, la loi sur le droit de réunion, la loi sur l’armée, devront être votées dans la session. Il y a enfin le budget, où, si c’est nécessaire, l’opposition pourra trouver l’occasion de traiter toutes les questions que l’on rencontrait autrefois dans l’adresse. Ces lois et ces questions sont par leur nature essentiellement pratiques, et l’opposition n’y rencontrera plus les difficultés fatigantes et les déviations irritantes qui naissent des débats sur les principes constitutionnels.

Qu’est-ce que la publication du livre jaune, sinon un appel du gouvernement soumettant sa politique extérieure au jugement des chambres et du pays? Nous ne serons cependant démentis par personne, si nous déclarons insuffisans les documens diplomatiques insérés au livre jaune qui sont relatifs à la crise et à la guerre allemandes. C’est sur le travail diplomatique antérieur à la guerre que les informations officielles font défaut. Il est dans la nature des choses, et nous l’avons toujours soutenu, que l’alliance de l’Italie avec la Prusse n’ait pas été conclue sans que le gouvernement français ait été prévenu par le gouvernement italien d’un acte aussi grave. Les informations que l’Italie a dû nous donner, les conseils qu’elle a pu nous demander ont certainement laissé des traces dans nos archives diplomatiques. Il importerait de connaître le langage qui a été tenu officiellement à cette époque par le gouvernement français au gouvernement italien. Sur ce point, le livre jaune est muet; il est muet aussi sur les communications de même nature qui, à la même époque, ont dû être échangées entre Paris et Berlin. Le livre jaune ne contient guère que les documens qui sont comme la décoration de notre politique étrangère; il ne nous en livre point où se puissent saisir et juger les ressorts intérieurs de cette