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W E B E R
SON GÉNIE ET SON INFLUENCE

La vie d’un artiste est écrite dans ses œuvres. Les tableaux du peintre, les partitions du musicien, sont des monographies pour servir à l’histoire de leur temps. J’aime qu’on tienne en honneur les vieux papiers d’état, qu’on se perde la vue à déchiffrer d’anciennes correspondances; mais il existe d’autres documens qu’il faut également savoir comprendre. Nos musées, nos théâtres, nos salles de concert sont aussi des archives. D’un maître ayant fait époque, rien ne doit être laissé de côté; les splendides caricatures du Vinci qui se voient à Munich en disent plus que maint volume sur la renaissance. Le chef-d’œuvre manquerait, qu’il y aurait encore le document. Pas une période, soit d’initiation, de transition, de décadence même, qui n’ait à nous renseigner sur quelque point. « D’un objet aimé, tout est cher, » remarque Figaro. Il n’est tableau de genre si maniéré, si mince étude, ouvrage de la mode, qui dans son fragment de miroir ne réfléchisse un coin du temps. Recherchons tout si nous voulons savoir; faisons comme le comte Almaviva qui ramasse jusqu’aux épingles.

J’ai dit autrefois à cette place même, en parlant du grand poète Achim d’Arnim tout à mon aise[1], dans quels rapports, dans quelle intimité d’idées Charles-Marie de Weber vécut avec les romantiques de son temps, rapports plus intellectuels que personnels, tendances qui n’aimaient point à se voir de trop près dans les petites questions déménage. A Dresde par exemple, Weber et Tieck, ayant également affaire au théâtre de la cour, ne furent jamais pour per-

  1. Voyez la Revue du 1er juin et du 15 juillet 1855.