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superstitieux, même d’un patriotisme agressif. N’en croyons pas pour cela notre société en péril mortel, et reconnaissons qu’elle peut avoir pour barrières solides le sens économique, le progrès scientifique et industriel, l’aisance largement répandue, l’instruction universelle. Ces biens obtenus, d’autres et les meilleurs suivront. Les générations prospères feront les familles unies, et l’indépendance du corps procurera l’indépendance de l’esprit et l’élévation du cœur.

Cette foi robuste dans le progrès, cet optimisme persistant malgré les embarras au présent et les obscurités de l’avenir, nous ont accompagné dans chacune des études que nous avons faites des entreprises nouvelles et des œuvres matérielles de notre pays. C’est à cette seule condition qu’elles nous ont paru avoir tout leur prix. Sans méconnaître un affaiblissement passager des principes supérieurs de la morale et de la politique, nous n’avons pas voulu croire que la France eût dégénéré dans l’ensemble de la population. Quelques-uns se sont abaissés, parfois même dans les rangs supérieurs, mais combien se sont élevés parmi les humbles ! Pour employer une vieille métaphore, le flot populaire a monté. De cette rénovation qui a commencé par le dehors, dont l’embellissement des villes, le luxe des jardins, les progrès de l’habillement, de l’ameublement, de l’alimentation, sont les conséquences extérieures, sortira un peuple plus sain, plus ferme et plus hardi : la liberté octroyée et artificielle ne lui suffira plus, il la voudra conquise et définitive. Toute combinaison économique, toute institution financière qui contribue à sa fortune travaille donc aussi pour son progrès moral et pour sa liberté. À ce titre, la question des assurances nous a paru singulièrement opportune, et surtout celle des assurances en cas de décès, qui de toutes satisfont le mieux à l’intérêt des familles et à l’intérêt social. Pour en répandre le bienfait, nous avons indiqué la mutualité comme la forme la plus parfaite à introduire dans les combinaisons réservée à l’initiative privée, et après bien d’autres nous avons revendiqué pour l’état la mission de garantir un mode d’épargne ; un moyen de prévoyance aux individus à qui elle est le plus nécessaire, aux ouvriers, aux petits employés, aux hommes vivant de leur salaire et de leur gain de chaque jour, à ceux que M. Gladstone appelle les plus nombreux et les plus chers de ses concitoyens.


BAILLEUX DE MARISY