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et la vie de l’homme à l’abri des naufrages, de l’incendie, de la maladie et même des coups de la mort, en faisant de l’assurance ce que Mirabeau disait de l’économie, la seconde providence du genre humain. L’assurance maritime a été pratiquée par les peuples navigateurs de l’antiquité : les Romains connaissaient la rente viagère, et les érudits ont trouvé, à propos de la réserve Falcidie, un texte d’Ulpien qui donne les lois d’une table de vie moyenne. En France, la rente viagère était déjà réglementée au temps des Valois ; mais c’est seulement au XVIe siècle dans le Guidon de la mer, au XVIIe dans l’ordonnance de Colbert de 1681 sur la marine, qu’on trouve les premières règles de l’assurance maritime, seule admise chez nous, tandis que dès le XVe siècle l’Italie et l’Angleterre pratiquaient la prévoyance contre la maladie et l’épargne pour la dotation des jeunes gens. Ces indications sommaires montrent l’origine antique de l’assurance ; nous ne prétendons point ici remonter aussi haut, nous voulons seulement rassembler pour une période très limitée les renseignemens précieux que nous fournissent des ouvrages récemment publiés sur un ensemble de faits qui dénotent chez les peuples où on les observe un degré plus ou moins élevé de lumières et de civilisation. Ces ouvrages, dont quelques-uns ont une valeur incontestable, forment en quelque sorte un corps de doctrines philosophiques, économiques et sociales d’une véritable portée morale. Ce serait toutefois dépasser les bornes d’un cadre naturellement restreint que d’embrasser dans notre examen, au dehors comme chez nous, toutes les sortes d’assurances, c’est-à-dire les opérations qui ont pour objet de garantir l’homme ou ses biens contre certaines éventualités, conséquences naturelles de ce qu’on appelle assez improprement les lois du hasard. Dans cette lutte de l’homme non-seulement contre l’inconnu, mais contre l’incertain, nous n’envisagerons que les risques dont sa personne même est l’objet, et nous n’étudierons que les institutions par lesquelles ces risques sont amoindris.

Parmi beaucoup d’autres, MM. de Courcy, Hubbard, Reboul, Aug. Cochin, ont, depuis quelques années, plus spécialement poursuivi une véritable propagande d’économie et de prévoyance sociales avec toute la chaleur d’une conviction profonde. Un de nos plus spirituels écrivains, M. Edmond About, s’est efforcé de mettre au service d’une question d’argent le talent d’exposition lucide et de fine vulgarisation qu’il avait appliqué déjà au défrichement de nos landes bordelaises. En même temps les hommes d’affaires, secondés par les écrivains, créaient en Angleterre, en Allemagne, aux États-Unis, en France, des établissemens où toutes les formes de l’assurance sur la vie étaient admises ; le monde politique, les pouvoirs publics, abordèrent enfin ce grand sujet avec une sollicitude qui, nous devons