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l’industrie, quand on tient à maintenir l’homogénéité d’une matière fondue, on est quelquefois obligé d’agiter vivement le bain tant que dure la fusion. La production de ce phénomène constitue, dit-on, une des difficultés de la fabrication des canons de bronze. Si la liquation s’opère ainsi sur des quantités de matière relativement très petites, il n’est pas étonnant qu’il en soit de même dans le liquide de composition complexe qui forme au sein de la terre un véritable océan de feu.

Ces notions sur la constitution de la zone moyenne du globe ne sont pas les seules que fournisse l’étude des volcans. De cette étude on peut encore tirer de précieux renseignemens sur la configuration de la surface qui limite intérieurement la matière fondue. Les volcans en effet ne sont pas de simples pertuis isolés les uns des autres, creusés comme des puits étroits au travers de l’enveloppe extérieure de la terre. Il existe un ordre manifeste et depuis longtemps signalé dans la distribution géographique des centres éruptifs. Les principaux se trouvent toujours au point de croisement de certaines directions spéciales, dont l’importance et l’orientation ont été l’objet de savans travaux, et l’on sait en outre qu’ils sont ordinairement réunis de manière à former de longues files rectilignes, comme si chaque groupe était implanté sur une déchirure particulière de l’écorce terrestre. Les volcans de l’Amérique du Sud, alignés sur une étendue de plusieurs centaines de lieues, sont un type de cette disposition, et plus près de nous le Vésuve, Stromboli et l’Etna, rangés dans une même direction, sont encore regardés par tous les géologues comme appartenant à une même série. De plus il semble souvent exister certaines relations remarquables entre le degré d’activité des volcans d’un même groupe. Quand les fluides élastiques développés dans les profondeurs du sol par des causes encore obscures et probablement complexes[1] acquièrent une tension suffisante pour déterminer une éruption, dans les premiers momens la poussée se fait sentir sur toute l’étendue de la région volcanique en travail ; il semble qu’il y ait une période de surexcitation générale. Puis bientôt le mouvement se localise dans un centre d’action unique, tandis que tous les autres points s’assoupissent rapidement, et perdent même pendant quelque temps une partie de leur énergie ordinaire. Les choses se sont passées de cette façon dans un si grand nombre de cas qu’on en a déduit une loi générale, devenue populaire dans les pays qui sont le siège habituel des phénomènes ignés. J’ai eu moi-même récemment l’occasion d’en observer un remarquable exemple. Au commencement de 1865, l’Etna et le Vésuve sont entrés simultanément en éruption en même temps que Stromboli détonait avec violence et rejetait des flots de cendres ; mais au bout de quelques semaines l’Etna continuait seul ses grandioses manifestations, et vomissait pendant plusieurs mois des torrens de lave et de matières volatiles ; les

  1. Voyez la Revue du 15 août 1866.