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peu près deux fois par an. Ce glacier a dû, comme tous les autres, entrer en 1854 dans sa période de retrait ; mais il n’est peut-être pas revenu à son état antérieur, car après l’envahissement de 1667 il mit trente-quatre ans à rentrer dans ses limites habituelles.

On aurait tort de croire que tous les glaciers d’une même vallée doivent toujours avancer ou reculer simultanément. Une orientation différente, le nombre et la grandeur relatifs des affluens et des cirques où ils aboutissent, l’absence ou la présence de grandes moraines superficielles, peuvent déterminer la progression d’un glacier et le retrait d’un autre pendant les mêmes années. Ainsi M. de Billy a constaté que le glacier de Zermatt, après avoir progressé depuis soixante ans et envahi des prairies et des pâturages, commençait à peine son mouvement de retrait dans l’automne de 1866, tandis que le glacier de Findelen, distant de 4 kilomètres seulement du premier, reculait sans cesse depuis 1844. M. de Billy rend parfaitement compte de ces différences. Le glacier de Zermatt est tourné vers le nord, à l’abri des rayons solaires, couvert de puissantes moraines qui en affaiblissent l’effet, et alimenté par le concours de six puissans affluens, dont deux, le Gorner et le Grenzgletscher, aboutissent à de vastes cirques remplis de neige. Le glacier de Findelen au contraire est dirigé vers l’ouest, exposé aux rayons du soleil et dépourvu de moraines ; en outre il aboutit seul à un vaste cirque, et ses deux affluens en sont complètement dépourvus : moins alimenté, moins abrité, il recule tandis que l’autre avance. Le glacier de Zmutt, voisin de ceux dont nous venons de parler, couvert de débris, encaissé dans de hautes montagnes, est presque toujours stationnaire ou en voie de progression, quelles que soient les allures des autres glaciers des Alpes.

Rien, excepté les rochers les plus durs, ne peut résister à un glacier en marche. M. Ed. Collomb fut témoin, en septembre 1848, des ravages causés par le glacier d’Aletsch, le plus long de la Suisse, dans une forêt de sapins qui bordait sa rive gauche sur une longueur de quatre kilomètres. « Attaqué par les racines, l’arbre, dit-il, tombe et se trouve entraîné par le mouvement du glacier. Ceux qui sont pris entre la glace et la roche encaissante sont promptement déchirés, ceux qui tombent sur le glacier sont portés par lui, mais ils ne tardent pas à être entraînés dans l’intérieur. Au talus terminal, on les voit sortir de dessous la masse, les uns à moitié engagés dans la glace, d’autres complètement libres ; ceux-ci sont expulsés et précipités dans le torrent. Tous sont entièrement dépouillés de leur écorce et déchirés ; il ne reste que le tronc principal et les grosses branches, pliées et contournées. » M. Collomb estime que les sapins entraînés en septembre 1848 par le glacier