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Caucase, de l’Himalaya, du Thibet et des Cordillères. Dans les pays froids, la Norvège, la Laponie, la Nouvelle-Zélande ou la Terre-de-Feu, des montagnes relativement peu élevées sont chargées de glaciers. Enfin les terres les plus rapprochées de l’un et l’autre pôle, le Spitzberg, le Groenland, l’Amérique boréale, qui entourent le pôle nord, les terres Adélie, Victoria et Graham, que les navigateurs ont signalées autour du pôle sud, dorment ensevelies, pour ainsi dire, sous un manteau de glaces : non-seulement elles remplissent les vallées, mais elles recouvrent encore les plateaux et s’étendent dans les plaines jusqu’au bord de la mer.

Réservoirs d’eau inépuisables, les glaciers des montagnes sont la source des plus grands fleuves de l’Europe et de l’Asie, tels que le Rhin, le Rhône, le Pô, la Garonne, le Gange, l’Indus, etc. Loin de tarir pendant l’été comme les rivières alimentées par des sources, ces fleuves roulent des eaux d’autant plus abondantes que la chaleur est plus forte et partant la fusion de la glace plus rapide. Les glaciers permanens des deux pôles et les glaces flottantes qu’ils versent dans l’océan jouent un rôle plus important encore : ils sont les régulateurs de la météorologie terrestre. Sous l’influence des chaleurs de la zone torride, des courans aériens s’élèvent et se propagent en s’abaissant peu à peu jusqu’aux deux pôles; c’est le courant tropical. Refroidi au contact des glaces éternelles qui les assiègent, ce fleuve aérien revient sous le nom de contre-courant polaire rafraîchir les régions tempérées des deux hémisphères. L’étude des glaciers forme donc un des chapitres les plus intéressans de la géographie physique : de là les nombreuses études dont ils ont été l’objet de la part des voyageurs, des géologues et des physiciens.

Nous avons dit que la grandeur de ces fleuves de glace variait prodigieusement. Dans les montagnes des zones tempérées, elle est proportionnelle à la hauteur et à la configuration des massifs, dans les régions arctiques à la nature du climat, dans les unes et dans les autres à l’abondance des chutes de neige pendant la saison froide et à la température de l’air pendant l’été.

On distingue deux variétés de glaciers. Sur les contre-forts peu élevés parallèles aux grands massifs alpins et sur la chaîne centrale des Pyrénées, on aperçoit de petits glaciers, nichés dans des cavités tournées vers le nord, qui ont à peine la superficie de nos places publiques. Je citerai, comme un exemple connu de beaucoup de touristes, le petit glacier qui se trouve à 70 mètres au-dessous du sommet du Faulhorn dans le canton de Berne, à quelques minutes de l’hôtel d’où l’on jouit d’une si belle vue sur les Alpes bernoises. En septembre 1841, la surface de ce glacier, élevé de 2,610 mètres au- dessus de la mer, n’était que de 1,300 mètres carrés; de Saussure