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tout point excellent, et la phrase sur Rome a été d’une mesure et d’une justesse parfaites. Les hommes d’état italiens se relèvent et se montrent tout à fait dignes de la mission que la force des circonstances et le patriotisme leur ont donnée quand ils ont à exprimer leur pensée sur la séparation du spirituel et du temporel dans le gouvernement du catholicisme. M. le baron Ricasoli vient de faire une fois de plus ses preuves sur ce terrain nouveau et encore si mal frayé pour la masse des catholiques. Nous entendons parler de la belle lettre qu’il a écrite aux évêques réfugiés à Rome. Jamais en Europe la question des rapports de l’église avec l’état fondés sur la liberté n’avait été traitée par un homme d’état avec une largeur de vues, une logique désintéressée et une sagacité pratiques semblables à celles que M. Ricasoli a déployées dans sa lettre aux évêques. Le premier ministre italien a écrit là une page monumentale qui sera consultée désormais, par les libéraux et par les catholiques revenus au sang-froid et à la raison, toutes les fois qu’on aura à concilier par la liberté les droits de l’état avec ceux de la conscience chrétienne. En pensant et en écrivant ainsi, le baron Ricasoli n’a pas eu seulement le mérite de traduire l’opinion admirablement sensée de son pays ; il a rendu service à tous ceux qui professent, hors d’Italie, le même respect que lui pour l’indépendance de la société civile et les libertés de l’église. Appuyés sur ces fortes et honnêtes idées, si supérieures aux mesquines routines qui ont prévalu jusqu’à ce jour, et animés de patience à l’égard des minuties du gouvernement qui survit à Rome, les Italiens peuvent retrancher la question romaine de leurs préoccupations et de leurs soucis.

Il est un autre point où il faut applaudir cette année aux débuts du parlement et du gouvernement italiens dans la présente session. Le cabinet a présenté à la chambre un projet rectificatif de budget pour 1867 où le déficit qui avait été prévu à 250 millions est réduit à 186 ; mais la chambre et ses principaux hommes politiques se sont mis tout de suite d’accord sur ce point, que le déficit était trop considérable et qu’il fallait le réduire encore, si l’on voulait avoir l’espoir raisonnable de le combler soit avec des augmentations de recettes, soit avec de nouveaux impôts. La chambre n’a donc voulu voter le budget provisoire pour trois mois qu’à la condition que le ministère accepterait l’insertion dans la loi d’un article ainsi conçu : « Le gouvernement devra présenter avant le 15 janvier prochain un annexe au budget de 1867 proposant des économies à réaliser dans les différens départemens ministériels et spécialement dans ceux de la guerre et de la marine. » Le baron Ricasoli et le ministre des finances, appelés dans la commission chargée d’examiner la demande des douzièmes provisoires, y ont promis d’exécuter l’article introduit dans la loi, et le rapporteur de la commission a pu dire, aux applaudissemens de la chambre unanime, que l’Italie, qui a voulu son indépendance avec fermeté et l’a obtenue, est entrée dans une phase nouvelle où elle doit vouloir avec une fermeté égale la réor-