Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 65.djvu/854

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’élévation ou d’abaissement du liquide ne sauraient ainsi échapper à un procédé bien connu qui sert à reproduire également les traits des choses et des personnes. Il serait inutile d’énumérer bien d’autres instrumens self-registering ; ne suffit-il point de dire que tous les agens secrets de la nature, bons ou mauvais, signent d’une semblable manière leurs services ou portent témoignage contre eux-mêmes ? Le résultat de telles indications est envoyé tous les jours sous forme de bulletin à l’observatoire de Paris. Et pourtant, malgré tant de faits recueillis avec un si grand soin, la météorologie est encore une science à l’état embryonnaire. On connaît exactement les différent degrés de pression atmosphérique, d’humidité, de température, de force des vents, on saisit quelques effets de l’électricité ; mais qui dévoilera la loi de ces phénomènes ? Jusqu’à ce que la cause soit connue, on ne fait guère que recueillir les matériaux d’un système cosmique. Dans l’état présent des choses, et les observateurs en conviennent eux-mêmes, la météorologie est un chaos dont les élémens pour prendre une forme attendent le fiat lux d’une idée.

Certes il est peu d’établissemens au monde qui rendent plus de services que celui de Greenwich, et pourtant il est entouré d’ennemis. Tandis qu’il surveille les mouvemens du ciel ou qu’il poursuit certaines actions cachées de la nature, les serpens de fer dont la surface du Kent se montre partout enveloppée cherchent à pénétrer sur son terrain. La guerre entre les railways et l’observatoire est ancienne et remonte aussi loin que 1835. Depuis lors divers projets ont été repousses par les chambres ; mais les compagnies reviennent toujours à la charge. Ce que craint l’astronome royal dans le voisinage des chemins de fer est l’ébranlement du sol, qui pourrait troubler certaines expériences délicates. Il avait pourtant consenti vers 1846 à ce que la ligne de la compagnie, du sud-est, South-Eastern railway company, traversât le parc de Greenwich sous un tunnel, à dix-huit ou dix-neuf cents pieds de distance des chambres d’observation. La pesanteur ainsi que la vitesse des trains devaient d’ailleurs être fixées par des règlemens sévères, et dans de telles conditions le mal ne pouvait pas être bien grand pour la science. L’observatoire d’Edimbourg se trouve bâti sur une colline, Calton-Hill, que traverse le North-British railway ; la roche est dure, et par conséquent de nature à transmettre plus aisément les vibrations ; toutefois les instrumens n’ont pas souffert jusqu’ici du passage de ce tumultueux voisin. Le projet fut pourtant abandonné, mais pour faire bientôt place à un autre tout autrement dangereux en ce qui regarde les intérêts de l’astronomie. Il s’agit cette fois d’amener par la ville de Londres tout le commerce du nord de l’Angleterre jusqu’aux diverses parties du Kent et de le faire circuler à travers