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aujourd’hui connus ; mais il est nécessaire de recommencer de temps en temps les expertises pour écarter les moindres chances d’erreur. Ces anciennes divisions géodésiques n’ont-elles point d’ailleurs été tracées dans un âge où la science ne disposait pas des agens mécaniques dont elle utilise aujourd’hui les services ? Frappé de ce dernier avantage et bien résolu à en tirer parti, l’astronome royal s’entendit vers 1853 avec M. Quételet pour déterminer la différence de longitude entre l’observatoire de Greenwich et celui de Bruxelles. L’opération conduite par les savans des deux pays fut couronnée d’un véritable succès. Vers le même temps, de semblables négociations s’étaient ouvertes entre deux autres observatoires, et la dernière lettre écrite à ce propos par M. Airy arrivait à Paris le jour même de la mort d’Arago. Les arrangemens furent repris avec son successeur, M. Leverrier, et cette fois les travaux commencèrent. La voie était d’ailleurs toute préparée, car déjà l’observatoire de Greenwich se trouvait relié à celui de Paris par un système de fils télégraphiques. Les messages couraient de l’un à l’autre après avoir traversé la Manche au moyen d’un câble qui s’étend sous l’eau entre South-Foreland en Angleterre et Sangatte en France. Il n’y avait donc qu’à profiter de cette circonstance pour organiser le service de la nouvelle enquête astronomique. Dans le cas dont il s’agit, M. Faye fut envoyé de France comme le représentant de M. Leverrier, et M. Dunkin partit d’Angleterre comme le représentant de M. Airy. Chacun d’eux devait conduire en même temps la première série des travaux en tout ce qui regardait les instrumens, le passage des astres et les signaux électriques. Ceci fait, l’observateur français revint à Paris, et l’observateur anglais s’en retourna de son côté à Londres pour diriger la seconde moitié des expériences. Ces déplacemens et cet emploi alternatif des forces de deux astronomes étrangers l’un à l’autre ont été jugés nécessaires dans toutes les études de ce genre pour éloigner l’ombre même d’une méprise. Durant les dix-huit jours qui s’écoulèrent à partir du commencement jusqu’à la fin de l’opération, les deux observatoires échangèrent entre eux deux mille cinq cent trente signaux[1].

Les mêmes procédés ont été employés en 1863 pour mesurer la longitude entre Greenwich et Valentia, une île de l’Irlande qui tend chaque jour à prendre une grande importance par suite des communications avec le nord de l’Amérique. Cette fois la difficulté était

  1. Les résultats obtenus par cette dernière statistique du ciel proclament que la différence de longitude entre l’observatoire de Greenwich et celui de Paris est de 9 minutes 20 secondes 63. C’est presque une seconde de moins que n’avaient trouvé en 1825 John Herschel et le colonel Sabine. A défaut de fils électriques (alors inconnus), ces deux derniers astronomes s’étaient servi de fusées pour communiquer les signaux.