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doit assurément suggérer aux hommes d’état italiens des conseils de patience et de prudente modération.

La force des événemens a ainsi donné à l’Italie une vocation de grand peuple appelé à influer sur les destinées religieuses et politiques des autres nations. Une mission pareille devrait inspirer un profond sentiment de dignité aux hommes d’état chargés du gouvernement de l’Italie. Il y a malheureusement un pénible contraste entre la grandeur des transactions que le cabinet italien doit entamer à une date prochaine avec le gouvernement du catholicisme et les présentes conditions matérielles de l’Italie. Le gouvernement de Florence est obligé de vaincre et de réprimer en Sicile une brutale sédition ; il n’est point maître d’assurer à toutes ses provinces les garanties de l’ordre matériel ; il a en outre à lutter contre la pression douloureuse de la gêne financière. Nous ne mettons point en doute qu’il ne vienne à bout de ces pénibles difficultés. Le rétablissement de l’ordre dans les régions troublées par le brigandage n’est plus qu’une affaire de temps, maintenant que l’Italie recouvre par la paix la disposition complète de ses forces. La question financière est plus compliquée et peut-être plus difficile. Il serait plus à craindre qu’elle ne fût compromise par des mesures précipitées et mal coordonnées. Le mieux pour le trésor italien serait de renoncer aux expédiens usuraires et de ne pas chercher des secours incomplets dans des aliénations imprévoyantes de ressources futures. Que le gouvernement mette fin le plus tôt possible à l’ère des pleins pouvoirs. Une fois la paix conclue, il doit connaître et faire connaître au public ses besoins d’argent et ses ressources. Le crédit financier de l’Italie et rétablissement régulier de ses services, publics ne peuvent s’établir que par un appel sage et courageux au crédit, justifié par une révélation claire et complète des élémens de la situation financière.

Tandis qu’en France il y a lieu de critiquer la mollesse et la circonspection des mœurs publiques, les États-Unis en ce moment nous opposent le contraste d’un spectacle bien différent. Qui n’est frappé de la lutte véhémente engagée depuis un an entre le président Johnson et le parti républicain, le parti qui a empêché la dissolution des États-Unis, et qui est représenté par la majorité du congrès ? L’épisode le plus caractéristique de cette lutte est ce curieux voyage du président Johnson dans les états du nord et de l’ouest qui vient de se terminer. Il est difficile à des étrangers de prendre parti dans les discussions intérieures d’un peuple. Nous ne pouvons nous passionner avec l’impétuosité et la violence américaine ni contre Johnson et Seward, ni contre Thaddeus Stevens et Sumner. Ces vigoureux partisans se combattent par des accusations calomnieuses auxquelles nous ne saurions nous joindre ni d’un côté ni de l’autre. Il nous est plus facile et plus agréable de discerner, les mobiles honnêtes qui font agir chacun des deux partis. Johnson s’est placé sous la domination d’une idée simple bien propre à toucher un honnête homme chargé de la responsabilité d’un