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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.



30 septembre 1866.

La publication de la circulaire adressée par M. de La Valette aux agens de la France au dehors est une des manifestations de la nouvelle ère politique dont tous les esprits réfléchis aperçoivent les signes avant-coureurs. Un certain ordre de choses est en train de finir ; quelque chose de nouveau va commencer. En publiant au Moniteur la circulaire du ministre intérimaire des relations extérieures, le gouvernement a cédé instinctivement à la nécessité des circonstances curieuses où nous nous trouvons placés : il a compris qu’il fallait parler à l’esprit public, qu’il importait de définir une situation à laquelle l’opinion n’avait point été préparée, qu’il était urgent d’indiquer à la France un point de départ pour aborder des perspectives qui se présentaient a elle d’une façon si peu prévue. En se mettant à ce propos en communication avec le public, le gouvernement a posé le problème et a ébauché une solution provisoire ; avant tout, il a pris pour lui-même et il a donné à la France une contenance. On ne peut que le remercier d’avoir compris ce premier besoin d’une situation incertaine et embarrassée, et d’avoir très raisonnablement et assez galamment assis sur la paix ses vues et ses conjectures.

Peut-être y a-t-il lieu de regretter que le gouvernement n’ait eu à sa disposition, pour parler au public, d’autre moyen que la rédaction d’un document diplomatique. Dans la situation où nous sommes, il eût fallu peut-être, pour s’adresser à l’opinion publique, une forme plus prime-sautière, plus élastique, plus flottante. Dans les pays où le régime représentatif a ses libres allures, les ministres qui sont des chefs d’opinions en même temps que des agens et des organes du pouvoir, ont mille occasions d’éveiller, d’éclairer, de guider la pensée publique sans se lier dans les formules dogmatiques des papiers d’état. Aux États-Unis ou en Angleterre, que le ministre des affaires étrangères ait quelque chose à dire au public dans l’intervalle des sessions, une réunion d’électeurs, un banquet de lord-