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occident : il n’en est rien, elles ont rayonné dans tous les sens, car pendant que la Perse, l’Asie-Mineure, la Grèce et l’Italie développaient une civilisation brillante, qui a passé aux peuples modernes de l’Europe et de là en Amérique, une autre branche des Aryas descendait par Attock dans les vallées de l’Indus, où elle a composé les hymnes du Vêda ; puis elle s’étendait dans les plaines du Gange, conquérait la péninsule et l’île de Ceylan et fondait la grande civilisation brahmanique ; plus tard la religion bouddhique, née au milieu d’elle, rayonna de l’Inde dans toutes les directions, convertit aux idées aryennes la majeure partie des peuples jaunes de Siam au Japon, pénétra dans les îles de l’océan et par le nord s’avança jusqu’au Mexique, où nous retrouvons aujourd’hui ses monumens. La race de l’Oxus a donc enveloppé la terre ; les Hellènes sont un des plus brillans rameaux du tronc aryen, mais non le seul ; il y en a eu deux autres dans l’antiquité, la Perse, qui a de beaucoup dépassé la Grèce en matière religieuse, et l’Inde, qui est par excellence le pays de la métaphysique et de la morale. Ces différentes parties de la famille aryenne ont souvent exercé les unes sur les autres une action réciproque sans que ces influences aient fait dévier la civilisation dans sa marche, parce qu’elles ont été exercées par des hommes appartenant à une même famille humaine.

Se trouvant séparées les unes des autres par la distance, elles ont eu chacune un développement particulier. Ainsi parmi les dieux grecs, que Muller croyait être un produit spontané du génie populaire des Hellènes, il n’en est presque pas qui n’appartiennent à toutes les branches de la famille aryenne ou à plusieurs d’entre elles. Ils représentent sans exception des forces de la nature, la plupart physiques, quelques-unes morales ou intellectuelles. Comme ces forces embrassent un plus ou moins grand nombre de phénomènes dont elles sont les causes, la puissance et le domaine de chaque dieu ont des limites déterminées dans lesquelles s’exerce son activité ; mais lorsque la réflexion eut montré aux Grecs que ces forces sont dépendantes les unes des autres et que de cette subordination dérive l’harmonie du monde, ils en conclurent que les dieux sont aussi rangés dans une sorte de hiérarchie où les uns commandent et où les autres obéissent. Chaque divinité eut dès lors un cortège et une cour céleste d’autant plus nombreuse que les phénomènes auxquels elle présidait formaient des groupes plus nombreux et plus variés. La portion de la mythologie que les Grecs des différentes races ont ajoutée au fonds commun après leur départ de l’Asie centrale ne forme qu’un développement secondaire de la religion nationale, quoique plusieurs de ces divinités nouvelles aient pris dans les lettres et les arts une grande importance. Les anciens dieux occupent généralement les premières places dans le