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lutte désastreuse contre la nationalité d’un peuple. C’est là le côté général, politique, diplomatique, d’une question qui, au premier abord, semble n’impliquer qu’une simple difficulté de délimitation. C’est l’œuvre des traités de 1815 interprétée, poussée à bout par l’Autriche avec autant d’art que de persévérance, avec une habileté telle qu’une certaine confusion survit encore même après les désastres de la domination impériale en Italie.

Qu’on interroge cette situation dans son origine, dans ses développemens. Les traités de 1815 faisaient deux choses : d’un côté, ils énuméraient les possessions attribuées à l’Autriche avec un luxe de détails qui allait jusqu’à rappeler tous les traités antérieurs, même des traités qui n’étaient pour la cour de Vienne que des souvenirs de défaites ; de l’autre, ils décrétaient la constitution d’une Allemagne nouvelle organisée sous la forme d’une confédération où l’Autriche et la Prusse devaient entrer « pour celles de leurs possessions ayant anciennement appartenu à l’empire germanique. » Mais où commençait, où finissait cet ancien empire germanique ? Quelles étaient les possessions qui pouvaient entrer dans l’Allemagne nouvelle ? Comment procéder dans un travail qui pouvait avoir pour résultat de dénationaliser indirectement des populations, de rompre subrepticement un équilibre à peine fondé ? C’étaient là autant de questions dont l’Autriche et la Prusse n’étaient plus, à vrai dire, les uniques arbitres, puisque la nouvelle confédération germanique n’était que l’application d’un principe adopté en commun par les puissances européennes rassemblées à Vienne. Parmi les états allemands eux-mêmes, il y en avait qui pressentaient un péril dans le vague de cette désignation générale d’anciennes possessions germaniques, qui pressaient l’Autriche et la Prusse de s’expliquer avant tout. Le plénipotentiaire bavarois notamment, le prince de Wrede, observait dans une des conférences « qu’il était nécessaire que la Prusse et l’Autriche désignassent plus positivement ceux de leurs états qu’elles avaient l’intention de faire entrer dans la confédération, que l’Autriche avait indiqué entre autres le Tyrol italien et la Carinthie, mais que l’admission de ces deux états pourrait aisément entraîner l’Allemagne dans une guerre étrangère à ses intérêts, qu’il était important de ne pas admettre des états qui pourraient compromettre la confédération… »

C’était la première impression en présence d’une obscurité d’où pouvait sortir l’inconnu. Ainsi pressée de s’expliquer, l’Autriche n’en fit rien. Ce n’est que trois ans après que, par un protocole du 6 avril 1818, simplement communiqué à la diète de Francfort, elle se décidait à désigner celles de ses possessions qu’elle entendait faire entrer dans la confédération. « Bien que sa majesté,