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Le Mexique compte dix-neuf états : il est borné à l’est par le golfe du Mexique, au sud par l’Amérique centrale, à l’ouest par l’Océan-Pacifique, et au nord par les États-Unis. De la pointe du Yucatan à la limite de la Sonora, points extrêmes de l’empire au sud et au nord, la distance à vol d’oiseau égale trois fois et demie celle de Marseille à Dunkerque. La largeur moyenne varie entre 280 et 1000 kilomètres. Le Mexique proprement dit, formant un tout homogène et nettement délimité, n’existe que sur la carte. De tout temps, à l’époque même la plus prospère de la république, sans parler des provinces détachées par la conquête, comme le Texas, la plupart des états, ont lutté contre la centralisation, réclamant leur autonomie et repoussant la domination de Mexico. Au sud, jamais le Yucatan ne s’est étroitement uni à la capitale ; Campêche et Mérida, qui en sont les deux villes principales, luttent même constamment entre elles : depuis quatre ans, nous y avons dépensé hommes et argent à trois reprises différentes sans succès durable. Le dernier voyage de l’impératrice Charlotte dans cet état, où elle était accompagnée par une des familles considérables du pays, la famille Gutierrez, dévouée à la cause impériale, n’a pas été suivi d’heureux résultats. A l’ouest, sur le versant des Cordillères, une grande partie de la côte baignée par le Pacifique, habitée par les Indiens Pintos, peuplade fort belliqueuse, est toujours restée insoumise à l’autorité présidentielle. Les Pintos ne reconnaissent pour maître que le vieil Alvarès, qui guerroie encore aujourd’hui. Le port d’Acapulco lui servait de quartier-général. La seule concession qu’on put obtenir du chef indien fut de consentir à vivre en paix avec ses voisins et à payer un léger tribut. Au-nord, vers les grandes prairies, le Cohahuila et le Chihuahua, dont la petite capitale a donné longtemps et donne encore l’hospitalité à Juarès, ne se sont ralliés que pour repousser d’un commun effort l’invasion française. Même sous Juarès, le Mexique était plutôt une fédération qu’une république. Souvent, les états du centre nommaient un second président, et le fauteuil restait à celui des deux compétiteurs qui avait le plus de canons. Certaines provinces étaient inconnues les unes aux autres, puisque le manque de routes s’opposait aux échanges et aux relations lointaines. Enfin les états excentriques, séparés de la capitale par des déserts, se souciaient peu d’envoyer leurs piastres et leurs soldats à Mexico, dont ils n’avaient aucune faveur ni aucun secours à attendre. Les circonstances sont-elles plus favorables aujourd’hui ? Maximilien peut-il songer sérieusement à réunir sous le même sceptre ce vaste faisceau disloqué ? Il est difficile de le croire. Disons plus, il est mathématiquement impossible que l’armée mexicaine suffise à couvrir le