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sous la domination des hacenderos et des prêtres. Dans l’armée, égarée par des mécontens et par des émissaires sortis des deux camps, survinrent de cruelles défections. Les caisses de l’état se vidaient pour satisfaire aux besoins publics, et les revenus étaient en partie dérobés par une administration infidèle ou confisqués par les bandes juaristes Les biens du clergé furent enfin déclarés propriété légitime des acquéreurs non frauduleux : cette mesure, trop tardive pour réchauffer l’enthousiasme libéral, déchaîna la fureur des cléricaux.

Si la discorde régnait autour du palais impérial, l’harmonie était troublée peu à peu dans l’intérieur même du conseil. L’empereur avait été suivi depuis l’Allemagne par son précepteur, conseiller aulique, ami aussi intelligent que dévoué à son royal élève ; tous ses efforts tendaient à rallier les libéraux les plus honnêtes, dont il sentait le concours indispensable pour le triomphe de la cause impérialiste. Son action ne tarda pas à être contrecarrée par M. Eloïn, conseiller d’état belge en mission, attaché au service de l’impératrice et animé de médiocres sympathies pour les Français. Le conseiller aulique, malgré son dévouement éprouvé, succomba sous l’influence du conseiller belge, et dès le mois de mars 1865, sourd à la prière de l’empereur, qui prêchait l’union, il crut de sa dignité de retourner à Trieste. Les chefs militaires qui, par les armes ou les négociations, avaient le plus contribué à l’établissement de l’empire, Marquez et Wool, disparurent de la scène militaire ou politique. Deux généraux mexicains qui avaient joué un rôle important soit sous la république, soit depuis notre débarquement, et dont l’influence sur leurs états devait être mise à profit, Uraga et Vidaurri, furent froissés sans raison. Les rapports de la cour avec l’autorité française devinrent assez tendus. Les Autrichiens obéissaient à regret aux officiers mexicains, et les Belges se plaignaient d’avoir été trompés, prétendant être venus en colons armés, appelés à cultiver des terres et à les défendre au besoin, mais non en soldats permanens. Tout récemment on s’est vu forcé de licencier d’urgence le contingent belge pour cause d’indiscipline. L’appel de ces troupes auxiliaires était une faute, leur présence rappelait trop l’origine étrangère du souverain, et constituait vis-à-vis des troupes nationales un acte de méfiance que nous comprenons, mais qui ne devait pas moins être vu de mauvais œil. Peu à peu des pronunciamientos furent tentés avec succès sur plusieurs points de provinces jusque-là restées fidèles. Pendant ce temps, l’armée française marchait toujours, guerroyant sur 1800 lieues de pays, conquérant successivement des territoires que l’armée impérialiste reperdait le lendemain. À cette heure, Maximilien voit l’orage grandir. Les