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communications préparées par les membres et pour les discuter, s’il y a lieu. Le soir du premier jour, après la séance du comité général et la constitution des bureaux, on se réunit en assemblée solennelle pour entendre le discours d’ouverture que le président a eu le temps de méditer depuis sa nomination. Ce discours roule presque toujours sur les progrès accomplis dans les différentes branches des connaissances humaines ; quelquefois aussi, comme l’a fait M. Willis en 1862, le nouveau président résume les travaux de l’association depuis l’époque de sa fondation, et ce n’est pas, ce nous semble, le sujet le moins intéressant qu’il puisse choisir. Cette année, les réunions ont été présidées par M. Grove, inventeur d’une pile très répandue et auteur d’un ouvrage sur la corrélation des forces physiques. M. Grove avait pris pour sujet de son discours la continuité des phénomènes que nous offre le monde matériel ; il a développé cette idée en s’appuyant sur les découvertes les plus récentes qui ont été faites dans le domaine de l’astronomie, de la physique, de la géologie, de l’histoire naturelle.

Les soirées suivantes de la « semaine des sages » (wise-week), comme l’appelle le public anglais, sont remplies par quelques leçons confiées à d’habiles professeurs et analogues aux conférences de la Sorbonne, par d’homériques dîners ou par des excursions dans les villes voisines qui ont envoyé des invitations. Un bulletin imprimé, qui parait chaque matin, fait connaître l’ordre du jour arrêté la veille par le comité local. Toutes les mesures sont prises pour rendre agréable et profitable à tout le monde cette « vendange » annuelle qui réalise tardivement un des plus beaux projets conçus par le lord-chancelier Bacon[1].

L’Association britannique, tout en contribuant d’une manière directe et très efficace au progrès des sciences par les secours de toute sorte qu’elle accorde aux travailleurs, a obtenu un autre succès non moins important : elle a réussi à intéresser de plus en plus le gouvernement et toute la nation aux recherches d’un ordre élevé. On peut dire aujourd’hui qu’elle dispose du fonds public ; son intervention a toujours été si bien motivée qu’on s’est presque habitué à regarder comme obligatoire l’accomplissement des vœux qu’elle émet. C’est aux efforts persistans de l’association que l’on doit la popularité toujours croissante des recherches scientifiques en Angleterre, et la confiance avec laquelle les capitaux répondent dans ce pays à l’appel des promoteurs d’une entreprise garantie par les savans. L’histoire du câble atlantique est pleine d’enseignemens sous ce rapport.

Si on voulait juger l’utilité de l’association et la grandeur des résultats à un point de vue essentiellement anglais, on n’aurait qu’à additionner les chiffres des sommes dépensées par elle depuis trente-six ans dans l’intérêt de la science. Nous nous bornerons à constater que le total de ces sommes dépasse aujourd’hui 600,000 francs, dont deux tiers ont été attribués à la

  1. La Maison de Salomon, dont il est question dans la Nouvelle Atlantide.