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sujet du caractère tout différent de la mesure décidée par le comte Russell et par M. Gladstone. Cette appréhension n’était pas entièrement imaginaire, s’il est vrai qu’on eût envoyé, ainsi que l’a raconté M. Watkin, des billets de la Banque d’Angleterre de Madrid à Liverpool avec ordre de les négocier à tout prix. Rien de pareil n’était à craindre cependant sur les marchés importans de Paris et d’Amsterdam ; personne n’y pouvait commettre l’erreur grossière.de confondre avec une suspension de paiemens la simple faculté d’émettre une faible somme de billets, faculté dont on savait que la Banque d’Angleterre ne ferait qu’un discret usage. La sollicitude qui avait porté lord Clarendon il cette démarche inusitée a pu être mal interprétée ; des esprits timorés ont pu y voir un indice de plus du trouble causé par la crise. Ce qui est vrai, c’est que, malgré l’incontestable habileté de la rédaction, la missive du Foreign-Oflice a manqué le but qu’elle voulait atteindre, elle n’est pas parvenue à calmer les esprits. — L’exposé fait par M. Watkin est méthodique et complet ; il n’entendait soulever aucune discussion théorique, et la liberté d’émission n’a pas même obtenu de sa part, l’honneur d’une mention. Il s’est borné à faire porter sur la limitation inflexible consacrée par l’act et sur la division des deux départemens de la Banque la responsabilité, du taux (énorme*, de 10 pour. 100, ainsi que les variations fréquentes et spasmodiques de l’escompte, « On arguerait vainement, dit-il, d’une insuffisance de ressources. Le pays n’a jamais été aussi puissamment riche ; tout le tort est du côté de la Banque, qui n’a point accru la circulation, et du côté d’une vicieuse séparation de l’émission et de l’escompte. »

M. Watkin concluait en demandant la nomination d’une commission royale, qui serait formée comme la commission chargée en France de la grande enquête sur les banques, mais, qui fonctionnerait dans un cadre plus restreint. Cette motion a été appuyée par M. Akroyd, qui posa la question de savoir si le nouveau cabinet entendait endosser la responsabilité prise par le dernier chancelier de l’échiquier, M. Gladstone, qui avait suspendu l’act de 1844. Cette interpellation a fourni a sir Stafford Northcote, le nouveau ministre du commerce, l’heureuse occasion d’une réponse pleine d’humour et de sens, conçue dans un excellent esprit et servie par un rare bonheur d’expressions. L’organe du cabinet ne s’est point borné à repousser la demande de la formation d’une commission, il a expliqué en excellens termes une doctrine saine, ainsi qu’une adhésion complète au système de 1844. Sans dissimuler ce que les trois suspensions prononcées chacune à peu près à dix années d’intervalle peuvent soulever d’objections contre certains détails de l’act, il en a fermement affirmé le principe. Il ne le regarde point