Page:Revue des Deux Mondes - 1866 - tome 64.djvu/871

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE
GRAND ŒUVRE
ENTRETIENS SOUS UN CHATAIGNIER
TROISIEME PARTIE.[1]


XI.

30 septembre.

Je viens de relire ta lettre. Dans ce réquisitoire écrit de bonne encre, je trouve un passage que je ferai bien, je pense, de m’appliquer. Tu peins certains optimistes de ta connaissance qui se sont fait une philosophie d’hommes gras, et qui par égard pour leurs digestions ont juré de ne plus se fâcher. Ils ôtent leur bonnet à la sottise, ils ont des indulgences d’état pour le crime heureux, ils approuvent tout indistinctement : le 18 brumaire, la perruque du grand roi, même les temps de ténèbres et de barbarie, l’âge d’or du froc et des coupe-jarrets; ils ont découvert que tout a du bon, et décidé, quoi qu’il arrive, de donner toujours raison à M. le prieur. Sur quoi tu t’écries : « A quoi se réduit l’histoire moderne de l’Europe? A douze siècles de massacres inutiles suivis d’une révolution avortée. »

Quelle mouche t’avait piqué? et que penseras-tu de ma réponse, si je te l’envoie jamais? M’assigneras-tu une place dans la confrérie

  1. Voyez la Revue du 15 juillet et du 1er août.