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que par conséquent, si le roi y doit venir, ces deux puissances si longtemps ennemies s’y trouveront face à face.

Si toutes les raisons qu’il développe à ce propos ne sont pas sans réplique, du moins elles sont graves et peut-être de nature à diminuer le désir qu’éprouve l’Italie d’avoir Rome pour capitale. Ce qui est nécessaire et juste, c’est que Rome devienne une ville italienne, qu’elle envoie ses enfans sous les drapeaux, ses députés au parlement, sa part d’impôts au trésor national; mais puisque l’opinion générale parmi les peuples catholiques semble exiger que Pie IX et ses successeurs restent à Rome, il est bon qu’ils y restent seuls, au milieu des ruines, des églises, des couvens, des prêtres, des moines et des cardinaux, avec tous les attributs de la souveraineté, sans en avoir les embarras ni le pouvoir. Dans ce cas, M. Rey se demande quelle doit être la capitale de l’Italie? Florence seule peut prétendre à cette destinée : elle est au centre de la péninsule, elle rappelle des souvenirs vraiment italiens, elle parle plus purement qu’on ne fait ailleurs le beau langage de la péninsule, elle est sans comparaison au premier rang pour la littérature et pour les arts. Cette considération n’est point sans valeur, car c’est par les arts et les lettres que l’Italie peut encore se flatter d’obtenir une primauté quelconque; par les armées et les finances, elle n’occuperait que le cinquième ou le sixième rang. Il se peut que Florence soit amollie par le despotisme : elle sera régénérée par la liberté.

Telles sont les conclusions de M. Rodolphe Rey : on ne peut dire qu’elles lui appartiennent. Il y a plusieurs années en effet qu’un noble et regrettable vétéran de la guerre, de la politique et des arts, M. Massimo d’Azeglio, a soutenu la même cause; sa voix alors resta sans écho. Il semblait à la nation entière qu’abandonner l’idée de Rome capitale, c’était renoncer au programme de Cavour; mais les Italiens, on le sait, ne s’enivrent guère d’absolu : peuple à l’esprit essentiellement politique, ils se plient aux circonstances, ils s’accoutument aux idées, aux sacrifices qui d’abord leur coûtaient le plus. A force d’y réfléchir, ils ont fini par faire cette distinction qui donnera peut-être un jour la solution du problème, entre Rome ville italienne et Rome capitale, entre le droit et la nécessité d’une part, l’enivrement et l’idée fixe de l’autre. Les recherches sur la grande question soulevée par la renaissance politique de l’Italie peuvent donc se continuer longtemps encore sans rien perdre de leur opportunité.


F.-T. PERRENS.


LA POLICE SOUS LOUIS XIV,
par M. Pierre Clément, de l’Institut[1].


Un des procédés par lesquels se sont ranimées chez nous les études historiques a été de substituer à des considérations lointaines et vagues une recherche sans cesse renouvelée de la réalité précise, de poursuivre avec une passion de vérité ce qui restait à découvrir d’informations inédites

  1. 1 vol. in-8o, Didier.