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renouvelle le sang et refait le corps. C’est cette partie utile des alimens qui s’oxyde ou se brûle ensuite sous l’influence de l’air introduit par la respiration pulmonaire, en laissant pour résidu de l’acide carbonique et de l’eau qui sont exhalés. Cette combustion lente fournit la chaleur animale, dont une grande partie se dissipe au dehors par le rayonnement du corps et par la transpiration cutanée, pendant qu’une autre fraction est convertie en travail musculaire, de même que la chaleur d’un foyer est utilisée pour faire marcher les roues d’une locomotive. L’animal puise toute sa vigueur dans les matières carbonées qui entrent dans sa nourriture; il ne fait que diriger l’application de la force qu’il tire tout entière de cette source. Or on a souvent répété que l’organisme vivant constituait un moteur beaucoup plus économique que nos machines à vapeur. Cette opinion était basée sur un calcul inexact. On avait comparé le travail fourni par un homme qui monte par exemple au Mont-Blanc avec le poids de carbone qu’il doit brûler pendant le temps que dure l’ascension; mais on avait oublié que la respiration et la circulation s’accélèrent pendant une pareille promenade, et qu’il en résulte une consommation beaucoup plus grande d’oxygène atmosphérique et une quantité plus grande de carbone brûlé. M. Hirn a fait à ce sujet des expériences très précises; l’homme qui a donné les meilleurs résultats dynamiques consommait par heure 132 grammes d’oxygène, en fournissant un travail équivalent à un huitième de cheval-vapeur. Or 132 grammes d’oxygène absorbé représentent un peu plus d’un cheval-vapeur dans une machine idéale dont le rendement se- rait de 100 pour 100; le travail effectif n’était donc qu’un huitième (à peu près 12 pour 100) du travail disponible. On voit que l’œuvre de l’homme supporte fort bien le parallèle avec l’organisme humain au point de vue du rendement mécanique et de l’économie du combustible.

Il serait intéressant de soumettre à des expériences analogues les moteurs naturels représentés par les oiseaux et par les insectes. Peut-être trouverait-on qu’ils sont aussi supérieurs sous ce rapport aux quadrupèdes qu’ils paraissent déjà l’être à un autre point de vue. On peut en effet se proposer d’évaluer la puissance relative d’un moteur par rapport à son poids. On se trouve amené à cet ordre de considération lorsqu’on cherche à se rendre compte de la possibilité de la navigation aérienne. Dans ce cas, la supériorité des oiseaux et des insectes devient manifeste; chez eux, la force est développée par un appareil dont le volume et le poids sont incomparablement plus modestes que chez les animaux plus élevés dans l’échelle zoologique.

D’après M. Hirn, une machine à vapeur qui fournit le travail d’un cheval de moyenne force pèse au moins dix fois plus que le moteur animé dont l’effort est pris pour terme de comparaison. On peut admettre néanmoins que les machines à vapeur de la marine, qu’on allège autant que possible, ne pèsent plus que 500 kilogrammes par force de cheval effec-