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ganisé : toutes les utricules, s’acquittant chacune de ses fonctions spéciales, sont entrées dans l’évolution vitale. Sous l’influence de cette force plastique qui de la plus infime molécule s’étend jusqu’à l’organisation des sphères au sein des nébuleuses, elles se sont mises les unes à remplir leur propre cavité de substances nutritives, les autres à s’allonger en vaisseaux tubulaires, celles-ci à monter dans la tigelle, celles-là à descendre dans la radicule, de telle sorte que de part et d’autre d’une ligne interne de démarcation se sont groupés les élémens constitutifs des deux grands systèmes dont se compose tout végétal.

Cette ligne de démarcation, cette surface mathématique plutôt, que Lamarck désigna par l’expression de nœud vital, s’appelle aujourd’hui le collet de la racine. C’est là la double base des deux systèmes axillaires dont il vient d’être question, et qui, semblables à deux pyramides allongées et symétriques, s’étendent l’un dans l’atmosphère, où il représente la partie aérienne, l’autre dans le sol, où il constitue la partie radiculaire. Chacune de ces pyramides a son chemin tout tracé et obéit à une tendance dont rien ne peut vaincre ni déjouer la loi impérieuse. Autant l’une met d’obstination à descendre dans la terre, vers l’obscurité, autant l’autre en met à s’élancer vers le zénith et la lumière. Parties analogues d’un même axe végétal et l’on pourrait presque dire d’une sorte de colonne vertébrale, elles n’ont de véritablement distinct que la tendance qui les entraîne vers deux directions opposées.

Mais il faut vivre, c’est-à-dire manger, et c’est pour cela que la radicule est sortie la première du gland. De son enveloppe ramollie, puis déchirée par suite du gonflement des tissus intérieurs, elle s’est échappée avide, impatiente de vivre. Crochue, d’un blanc jaunâtre, recouverte d’un léger duvet et coiffée d’une enveloppe protectrice, sorte de capuchon appelé piléorhize, elle s’est immédiatement dirigée vers la terre. Bientôt cependant son aspect se modifie; tandis que son extrémité s’allonge et que la base se revêt d’une coloration plus foncée, elle perd une partie des sucs aqueux qui la rendaient blanche et molle, ses poils se dessèchent, de nouvelles papilles recouvrent son épidémie d’innombrables suçoirs; de jeunes racines, armées de spongioles, s’en vont de toutes parts aux provisions. Rien ne saurait donner idée d’une aussi précoce voracité. Ce n’est pas pour elles-mêmes au reste que les radicules se mettent si avidement en quête, c’est pour la tigelle, qui de son côté monte affamée, réclamant à la terre et à l’air de l’eau, des sucs, des gaz.

Toutefois comment s’y prendre? Ni l’atmosphère, ni le sol ne peuvent spontanément répondre à ces exigences. Pour vivre d’une vie complète et soudaine, la plantule devrait puiser dans l’une et